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Photo de la célèbre enseigne américaine MC Donald's, née à San Bernardino
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McDonald’s conquiert nos campagnes : faut il s'inquiéter pour l’art de vivre à la Française?

Dans un paysage de restauration en profonde mutation, McDonald’s réoriente sa stratégie pour cibler les territoires ruraux. Forte de plus de 1 500 établissements en France, l’enseigne américaine vise une présence à moins de 20 minutes de chaque Français. Si cette dynamique d’expansion, articulée autour de 50 ouvertures prévues en 2025, peut sembler logique au regard de l’évolution des modes de consommation, elle suscite néanmoins de vives inquiétudes. Derrière cette volonté d’ancrage local se dessine une bataille culturelle et économique opposant restauration rapide et gastronomie de terroir, modernité fonctionnelle et sociabilité traditionnelle.

🎯 Une stratégie d’occupation du territoire bien calibrée

Dans un entretien accordé au Figaro, le directeur marketing de McDonald’s France affirme son ambition de rapprocher l’enseigne des zones moins denses : 

L’objectif est que chaque Français ait un McDo à moins de 20 minutes de chez lui

À l’appui de cette stratégie, une cinquantaine de nouvelles implantations sont planifiées sur l’année, dont certaines déjà effectives, comme à La Châtaigneraie (Vendée) ou Saint-Geniès-de-Malgoirès (Gard). Pour Jérôme Fourquet, directeur du département opinion à l’Ifop, cette orientation répond à un besoin structurel :

Lorsqu’ils s’installent dans des zones non désertées mais dépourvues de restauration rapide, le succès est souvent immédiat

McDonald’s cherche ainsi à s’imposer comme le « nouveau bistrot du coin », une formule qui résume bien son intention de devenir un acteur central de la vie sociale rurale. Ce positionnement rural traduit aussi une réponse directe à la saturation des zones urbaines, à la montée des enseignes concurrentes, et à une volonté de capter une clientèle nouvelle, parfois en demande de solutions de restauration standardisées, rapides et peu coûteuses. En misant sur ces « déserts commerciaux », McDonald’s pourrait ainsi consolider sa position de premier restaurateur de France.

🚨 Une menace pour les équilibres culturels et économiques locaux ?

Mais cette stratégie soulève de fortes critiques. Alain Fontaine, président de l’Association des Bistrots et Cafés de France, alerte sur la dénaturation progressive de l’identité gastronomique française.:

 Imaginez un McDonald’s à 30 mètres d’une fontaine du XIVe siècle ou sous des arcades médiévales. C’est une vision inquiétante

déclare-t-il sur BFMTV. Pour lui, l’implantation dans les campagnes va bien au-delà d’un enjeu commercial : c’est une question de civilisation.

Il déplore également la menace sur la sociabilité rurale, souvent incarnée par les cafés de village, qui jouent un rôle central dans le lien social. Ces établissements, déjà fragilisés par la baisse de fréquentation, la hausse des coûts et les contraintes réglementaires, peinent à concurrencer la puissance logistique et financière de géants comme McDonald’s.

Par ailleurs, les effets sanitaires de la généralisation de la malbouffe – dont l’enseigne est régulièrement accusée d’être un vecteur – ne sont pas à négliger, notamment dans des zones déjà marquées par une fragilisation des services médicaux.

Face à cette dynamique, Alain Fontaine appelle les pouvoirs publics à réagir : « Il faut donner les moyens aux maires de protéger leur commerce local ». Il évoque notamment la loi portée par Guillaume Kasbarian, qui facilite la préemption des commerces par les municipalités. Une approche qu’il résume par un mot d’ordre : « un village, un commerce ».

👁 L'œil de l'expert : le difficile équilibre entre développement et patrimoine

L’expansion de McDonald’s dans les campagnes est révélatrice d’un double enjeu : la redéfinition des équilibres commerciaux locaux et la tension entre mondialisation des usages et préservation de l’identité culturelle. Si la stratégie du géant américain répond à une logique de consommation contemporaine, elle doit impérativement s’inscrire dans une réflexion plus large sur l’aménagement du territoire et le maintien d’une vie sociale et gastronomique de proximité. Il s'agira aussi, pour les communes, de faire preuve de courage et de renforcer leurs capacités de préemption commerciale des communes rurales pour éviter les implantations subies. Un autre axe pourrait être d'établir des chartes d’intégration urbaine pour les enseignes nationales, encadrant leur implantation dans les zones patrimoniales. Mais aussi et surtout de continuer le long travail d’éducation alimentaire dans les campagnes pour limiter l’impact sanitaire de la restauration ultra transformée.

À propos de l'auteur

Conseiller financier chez FiniDeMePriver.com depuis près de 2 ans, Enzo Poulain met son expertise au service de ses clients en leur proposant des solutions sur mesure pour optimiser leur budget et simplifier la gestion de leurs finances. Doté d’un sens aigu du détail et d’un réel engagement pour le travail bien fait, Enzo partage également des astuces pratiques pour aider chacun à maintenir un budget équilibré et adapté à ses besoins.