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Photo d'une entrepreneuse devant son ordinateur, à analyser les chiffres de son business
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PGE : la bombe à retardement qui menace la trésorerie des TPE-PME françaises

Conçus comme un rempart face à la crise sanitaire de 2020, les Prêts Garantis par l’État (PGE) s'imposent aujourd’hui comme un fardeau budgétaire pour des milliers de petites entreprises françaises. À l’origine, ces crédits massivement distribués devaient sauver l’économie à court terme. Mais à moyen terme, ils exposent désormais les TPE-PME à des risques de trésorerie critiques, voire à la faillite. Derrière les chiffres du remboursement, se cache une mécanique financière redoutable qui dépasse les intentions initiales du « quoi qu’il en coûte ».

📉 Une dette qui rattrape les entreprises les plus fragiles

Déployé en mars 2020 pour faire face au choc économique du premier confinement, le PGE a permis à plus de 680 000 entreprises françaises d’accéder à des prêts bancaires garantis à 90 % par l’État. Le succès du dispositif fut incontestable : plus de 800 000 prêts contractés, représentant 145 milliards d’euros injectés dans l’économie.

Mais cinq ans après, la réalité a changé. Selon les chiffres relayés par Le Parisien le 24 juin, 107 milliards d’euros ont été remboursés, 30 milliards restent dus, et 5 milliards ont été pris en charge par l’État. Ce qui semblait à l’époque une réponse pragmatique à une crise exceptionnelle devient une charge structurelle, en particulier pour les TPE et PME ayant sollicité ces aides par nécessité plus que par stratégie.

La mise en place des PGE a été salutaire, mais les entreprises les plus vulnérables ont enchaîné les chocs : Covid, inflation, hausse des coûts de l’énergie, baisse de la consommation

observe Denis Le Bossé, président du Cabinet ARC, expert en recouvrement de créances commerciales. Pour ces structures sans matelas de fonds propres, le mur de la dette est désormais bien réel.

📊 Un défaut de conception qui asphyxie les marges

L’analyse de la rentabilité des PGE révèle une failles structurelles dans le modèle de remboursement imposé. Patrick Senicourt, président de Nota-PME, est formel :

Leur structure de remboursement sur quatre ans était fondamentalement incompatible avec la rentabilité d’une grande partie des TPE et PME.

En clair, les entreprises ont pu emprunter jusqu’à 25 % de leur chiffre d’affaires, mais doivent rembourser l’équivalent de 6,25 % par an, un seuil de rentabilité que plus de la moitié des petites structures françaises n’atteignent pas.

Le résultat est sans appel : les défaillances d'entreprises se multiplient, prises au piège d’un remboursement devenu insoutenable dans un contexte économique instable. En 2023, plus de 65 000 entreprises ont mis la clé sous la porte, selon les données publiées par l’U2P – un record qui alarme les acteurs économiques.

Aujourd’hui, environ 300 000 entreprises doivent encore rembourser un PGE. La Banque de France, sollicitée pour des restructurations, n’a traité qu’environ 1 500 dossiers, principalement sur des montants supérieurs à 50 000 euros. Autrement dit, une fraction seulement du problème a été prise en charge par les canaux institutionnels.

👁 L’œil de l’expert : le soutien d’urgence devenu poison

L’intention initiale était louable : protéger l’économie réelle d’un choc systémique. Mais les PGE, mal calibrés pour la durée et les capacités de remboursement réelles des petites structures, se transforment en bombe à retardement financière. En l’absence d’adaptations structurelles — allongement des délais, effacements partiels, ou refinancements encadrés —, la vague des défauts pourrait s’amplifier dès 2025, menaçant tout un pan du tissu entrepreneurial.

Ce cas révèle un enseignement précieux : soutenir, oui, mais avec discernement et avec des mécanismes adaptatifs. Car entre aide d’urgence et étouffement à long terme, la frontière est parfois fine, surtout pour les TPE.

À propos de l'auteur

Responsable du développement commercial au sein du Groupe Win'Up, Vanessa accompagne des entrepreneurs dans leur projet de création et participe au développement de la notoriété des enseignes du groupe. Sensible aux sujets économiques et financiers, Vanessa partage son avis sur les actualités.