Crise silencieuse des jeunes mères : 67 % se sentent seules après l’accouchement
Un isolement invisible mais bien présent : la maternité, souvent idéalisée comme un moment de plénitude, cache une réalité bien plus sombre pour une majorité de jeunes mères. Selon une enquête Kantar réalisée pour la marque Momcozy, dévoilée le 21 mai 2025, près de 7 femmes sur 10 (67 %) déclarent souffrir d’un sentiment de solitude après l’arrivée de leur enfant. Ce sondage, mené en ligne auprès de 1 000 Françaises ayant donné naissance depuis 2020, révèle l’ampleur d’un mal-être trop souvent passé sous silence, qui dépasse de loin les premières semaines du post-partum.
Fatigue extrême, sociabilité en berne et santé mentale fragilisée
La solitude des mères n’est pas une simple sensation passagère. Elle s’inscrit dans une charge mentale et physique écrasante, nourrie par des nuits hachées, une responsabilité parentale constante et un manque criant de soutien émotionnel. Selon les résultats de l’enquête, 76 % des répondantes désignent la fatigue comme cause principale de ce mal-être, suivie par la charge mentale (62 %), le manque d’écoute (39 %) et l’isolement social (33 %).
Un chiffre particulièrement alarmant : 32 % des mères ressentent toujours cette solitude des mois, voire des années après la naissance de leur enfant. Pour 42 % d’entre elles, ce sentiment est qualifié d’intense (entre 7/10 et 10/10 sur l’échelle proposée dans l’étude). Ce n’est donc pas un épisode isolé, mais une souffrance profonde, enracinée dans le quotidien.
Le cercle social s’est réduit depuis que je suis mère
confie l’une des participantes. Un constat partagé par 44 % des femmes interrogées, qui évoquent une vie sociale en berne, entre responsabilités familiales et fatigue chronique.
Ce climat de solitude favorise des troubles anxieux : 60 % des jeunes mères reconnaissent avoir ressenti du stress ou de l’angoisse depuis leur accouchement, tandis que 63 % parlent d’un épuisement causé par le manque de sommeil. Dans ce contexte, le risque de basculer dans une dépression post-partum est bien réel. Des travaux publiés dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire en 2023 révélaient que plus d’une femme sur six présentait des signes de ce trouble deux mois après l’accouchement, et une sur quatre souffrait d’anxiété. Plus alarmant encore : le suicide est la première cause de mortalité maternelle en France.
Un appel à l’action sur plusieurs axes
Face à cette détresse, les femmes ne réclament pas de promesses vagues mais des mesures concrètes. L’enquête Kantar montre que 61 % des mères interrogées souhaitent un allongement du congé maternité, jugé trop court pour permettre une véritable récupération physique et émotionnelle. Viennent ensuite le besoin d’un accompagnement psychologique dédié (51 %), une aide financière renforcée (49 %) et un accès facilité à des solutions de garde d’enfants (45 %).
Certaines avancées ont vu le jour. Depuis juillet 2022, un entretien postnatal obligatoire est prévu entre la 4e et la 8e semaine après l’accouchement, avec un médecin ou une sage-femme, pour dépister les signes de dépression. Mais selon de nombreux professionnels, cette mesure reste insuffisante. En octobre 2024, une tribune parue dans Le Monde, signée par des sages-femmes, des médecins et des associations, appelait à faire de la santé mentale maternelle une priorité nationale.
Nous faisons face à une crise silencieuse, mais massive
alertait l’un des auteurs de cette tribune. Pour ces spécialistes, il est temps de repenser l’accompagnement périnatal, non seulement sur le plan médical, mais aussi social et psychologique.
👁 L’œil de l’expert : une urgence sociale trop longtemps ignorée
La maternité ne peut plus être pensée comme une parenthèse heureuse qui se suffit à elle-même. Les chiffres révélés par ce sondage sont accablants, mais surtout révélateurs d’un modèle qui ne soutient pas suffisamment les mères. Derrière le discours souvent lisse sur la parentalité, se cache un isolement structurel, une santé mentale fragilisée et une absence de réponses institutionnelles adaptées. La société ne peut plus se contenter d’offrir aux jeunes mères des injonctions à la résilience : elle doit construire un écosystème de soutien durable, à la hauteur des défis qu’implique la maternité moderne.
À propos de l'auteur
Des années d’expérience et d’expertises financières, Fabien MONVOISIN est PDG du Groupe Win’Up composé de 4 enseignes spécialisées dans le regroupement de crédits, son ambition aujourd’hui est de décrypter l’actualité économique et financière dans l’objectif d’éclairer tous les Français