La légendaire verrerie Duralex, symbole du savoir-faire industriel français, revient de loin. Sauvée in extremis par ses salariés sous forme de SCOP (société coopérative de production) à l’été 2024, l’entreprise de La Chapelle-Saint-Mesmin écrit désormais une nouvelle page, entre redressement productif, stratégie d’investissement et ambitions de croissance. Mais si la renaissance est palpable, le défi économique reste immense : 17 millions d’euros devront être investis d’ici 2028 pour assurer la pérennité du site.
📈 Croissance encourageante, mais sous conditions strictes
Le tribunal de commerce d’Orléans, en validant en 2024 le projet de reprise par les salariés, a acté une initiative rare dans l’industrie française. Depuis, les premiers résultats parlent d’eux-mêmes : +20 % de progression du chiffre d’affaires, selon François Marciano, directeur général de Duralex SCOP SA, interrogé sur BFM Business. Le chiffre d’affaires devrait atteindre 33 millions d’euros en 2025, avec pour objectif les 35 millions d’euros d’ici 2027, seuil du retour à l’équilibre.
Mais ce redressement repose sur des bases fragiles. Comme le rappelle François Marciano :
Tant que l’on n’a pas sorti un bilan au mois d’avril, personne ne nous suivra. […] Il faut montrer patte blanche.
Les banques et investisseurs, échaudés par six redressements judiciaires successifs, attendent des preuves tangibles de la viabilité du modèle.
Les choix budgétaires sont donc extrêmement rigoureux. Exemple : la boutique d’Orléans fonctionne grâce à une rotation interne du personnel, sans nouvelle embauche.
Les salariés ne cherchent pas à s’enrichir, mais à sauver leur entreprise
rappelle Marciano. Cette discipline salariale permet de préserver les ressources pour les investissements cruciaux à venir.
🏭 Un plan d’investissement ambitieux
L’objectif n’est pas seulement de survivre, mais de moderniser Duralex pour en faire une verrerie résolument verte, compétitive à l’échelle internationale.
Il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup à faire
insiste François Marciano. Sur les trois prochaines années, 17 millions d’euros d’investissements sont nécessaires, dont 5 millions devraient être levés dès octobre via une émission d’obligations ouvertes aux particuliers.
Ce plan vise à financer plusieurs volets :
Innovation produit, pour retrouver une place sur les marchés internationaux.
Transition écologique, en adaptant les lignes de production à des normes plus sobres et durables.
Montée en gamme industrielle, pour reconquérir les clients perdus durant les années de turbulence.
La réimplantation à l’international a déjà commencé :
On est en train de se réimplanter dans tous les pays
affirme le directeur général, confiant mais lucide. L’enjeu : regagner la crédibilité commerciale que les faillites successives avaient entamée.
👁️ L’œil de l’expert
Le cas Duralex incarne un exemple inspirant mais exigeant de relance industrielle par les salariés eux-mêmes. Le modèle SCOP, souvent plus résilient à long terme, impose en revanche une gestion austère et des efforts collectifs rares dans l’industrie classique.
Le défi économique est triple :
Rassurer les partenaires financiers par des résultats concrets,
Mobiliser l’épargne citoyenne, un levier innovant mais incertain,
Transformer une entreprise historique en modèle industriel du XXIe siècle.
Si cette équation est résolue, Duralex ne sera plus seulement un nom iconique du made in France, mais un cas d’école de redressement coopératif réussi.