L’Inde s’apprête à franchir une étape historique avec un projet d’acquisition de 114 Rafale, dans le cadre du programme MRFA (Multi-Role Fighter Aircraft). Face aux tensions croissantes avec la Chine et le Pakistan, New Delhi entend moderniser massivement sa flotte aérienne tout en développant son industrie locale.
🔥 Pression géopolitique et calendrier
Le contexte régional joue un rôle déterminant dans cette décision. Les affrontements aériens récents, notamment lors de l’opération Sindoor (7–10 mai 2025), ont révélé les limites d’une aviation indienne vieillissante. Le retrait des derniers MiG-21 russes — emblématiques mais obsolètes — accentue l’urgence.
Actuellement, l’Indian Air Force (IAF) ne compte plus que 31 escadrons, loin des 42,5 exigés par son format opérationnel officiel. Selon un haut gradé cité par The Hindu, :
Avec le départ des MiG-21, nous tomberons à 29 escadrons, ce qui creuse dangereusement notre déficit capacitaire.
Pendant ce temps, la Chine poursuit un renforcement rapide de son arsenal, tandis que Pékin prévoit de livrer 40 chasseurs furtifs J-35A au Pakistan. Ce double front stratégique pousse New Delhi à agir vite pour éviter tout déséquilibre aérien.
🛫 Rafale F4 : choix tactique et économique
Malgré la concurrence féroce de Boeing, Lockheed Martin, Saab et Sukhoï, le Rafale F4 part favori. Ce modèle offre un double avantage : une compatibilité immédiate avec les bases d’Ambala et Hasimara, déjà configurées pour accueillir l’appareil, et la possibilité d’un accord direct avec Paris.
Cette voie permettrait de réduire les délais de livraison et de minimiser les coûts de formation et de maintenance, un atout financier majeur. Comme l’explique Franck Voccia, analyste défense cité par Le Point :
Choisir le Rafale F4, c’est capitaliser sur l’existant tout en limitant les surcoûts logistiques.
🏭 Partenariat industriel et casse-têtes technologiques
Le projet va bien au-delà d’un simple achat. La majorité des 114 appareils serait assemblée en Inde, grâce à un partenariat stratégique entre Dassault Aviation et Tata, déjà impliqué dans la production de fuselages.
Le ministère indien de la Défense envisage également un accord avec Safran pour développer un moteur destiné à son futur AMCA (Advanced Medium Combat Aircraft), renforçant ainsi l’autonomie technologique du pays.
Cependant, un point de friction majeur persiste : l’Inde réclame l’accès au code source du Rafale afin d’intégrer ses propres armements, tels que les missiles air-air Astra et les bombes guidées Sudarshan. Les industriels français, dont Safran, Thales et MBDA, s’y opposent, craignant de compromettre leur propriété intellectuelle.
👁️ L’œil de l’expert : contrat historique
Ce contrat, estimé à plusieurs dizaines de milliards d’euros, pourrait devenir l’un des plus importants de l’histoire de l’aéronautique militaire. Mais il reflète aussi un tournant : la défense devient un levier économique et industriel autant qu’un outil stratégique.
Pour la France, c’est l’opportunité de consolider son influence en Asie et de sécuriser un partenariat de long terme avec un pays-clé. Pour l’Inde, il s’agit d’un pari à double gain : renforcer sa dissuasion face à ses rivaux tout en stimulant sa production locale.
Dans un monde où la supériorité aérienne se joue désormais autant dans les salles de négociation que dans le ciel, le dossier Rafale–Inde pourrait bien être le deal géopolitique de la décennie.