Après plusieurs années de gel diplomatique et industriel, la Chine pourrait redonner un souffle nouveau à Boeing. Selon des informations révélées par Bloomberg, Pékin discute avec le constructeur américain d’une commande colossale allant jusqu’à 500 appareils. Une annonce qui survient après une séquence favorable à Airbus, mais qui pourrait rebattre les cartes de l’équilibre aéronautique mondial. Derrière les chiffres mirobolants, ce dossier illustre à la fois l’importance stratégique du marché chinois et les retombées financières potentielles pour l’industrie aérienne.
💰 Un enjeu important pour Boeing et Pékin
Pour Boeing, ce contrat marquerait un retour en force historique sur un marché qui lui a échappé ces dernières années. Le constructeur, pénalisé par la guerre commerciale entre Washington et Pékin, n’a enregistré qu’une trentaine de commandes chinoises depuis 2018. La dernière transaction d’ampleur remonte à 2017, lors de la visite de Donald Trump à Pékin, avec 300 avions pour 37 milliards de dollars.
Depuis, les difficultés se sont accumulées :
Crises techniques avec l’arrêt mondial du 737 MAX après deux crashs meurtriers.
Gel diplomatique : les surtaxes et sanctions réciproques ont freiné les livraisons.
Suspensions temporaires : encore en 2024, la Chine avait bloqué certaines réceptions en raison de tests supplémentaires exigés sur des batteries au lithium.
Un contrat de 500 avions redonnerait non seulement confiance aux investisseurs – l’action Boeing ayant déjà bondi de 3,7 % en Bourse après les premières fuites – mais permettrait aussi de sécuriser des dizaines de milliards de dollars de revenus futurs. Côté chinois, l’intérêt est double : répondre à la croissance exponentielle du trafic aérien (21 % des besoins mondiaux d’ici 2044 selon Boeing) et diversifier les approvisionnements dans un contexte où le constructeur local Comac ne produit pas encore suffisamment pour couvrir la demande.
🛫 Airbus en embuscade, mais pas serein
Ce méga-contrat potentiel n’est pas sans conséquence pour Airbus, longtemps favori de Pékin. En amont du Salon du Bourget, des rumeurs faisaient état d’une commande chinoise d’environ 300 appareils européens, dont plus de 100 A330neo. Mais ces discussions n’ont jamais abouti.
Comme l’a résumé l’analyste Jefferies :
La Chine étant en pourparlers avec Boeing pour un nombre important d’appareils, nous pensons que cela pourrait compromettre une éventuelle commande d’A330.
Si Airbus reste bien implanté en Chine grâce à ses chaînes d’assemblage locales et ses succès récents, la perspective d’un contrat massif en faveur de Boeing pourrait rééquilibrer le rapport de force transatlantique. Dans un marché où chaque point de part de marché se chiffre en dizaines de milliards d’euros, le moindre arbitrage de Pékin a des conséquences mondiales.
👁️ L’œil de l’expert : un signal envoyé
Ce dossier illustre parfaitement la dimension géopolitique de l’aéronautique. Derrière l’annonce d’un éventuel contrat, Pékin envoie un signal : la Chine entend jouer les deux géants l’un contre l’autre, Airbus et Boeing, afin d’obtenir les meilleures conditions commerciales et diplomatiques.
Pour Boeing, une telle victoire commerciale serait un bol d’oxygène stratégique après des années de crises techniques et financières. Mais la partie est loin d’être gagnée : tout dépendra du climat politique entre Washington et Pékin, où chaque décision commerciale se double d’un enjeu diplomatique.
En résumé, l’aéronautique mondiale se joue autant dans les usines de Seattle ou Toulouse que dans les coulisses diplomatiques de Pékin.