Face à l’envolée des violences urbaines et aux dégâts qu’elles engendrent, l’État français étudie la création d’un dispositif inédit pour sécuriser les particuliers, les entreprises et les collectivités : un fonds de réassurance dédié aux émeutes, financé par une surprime sur tous les contrats d’assurance.
☂️ Une surprime de 5 % pour sécuriser les assureurs et les victimes
Le projet, initié par la Direction générale du Trésor et étudié durant l’été, s’inspire du modèle du régime d’indemnisation des catastrophes naturelles. Concrètement, ce fonds émeutes pourrait couvrir jusqu’à 775 millions d’euros de dégâts par an, financé par une surprime de 5 % prélevée sur tous les contrats d’assurance touchant les biens des particuliers comme des entreprises.
Selon les documents consultés par Les Échos, le mécanisme envisagé indemniserait les victimes dès le premier euro de dégâts, avec une prise en charge allant de 20 % à 80 % des réparations, en fonction du ratio “sinistres à primes” (le montant total des sinistres divisé par le montant total des primes collectées). Le reste resterait à la charge des assureurs eux-mêmes, assurant un équilibre financier et une mutualisation du risque.
Les assureurs seraient également contraints de rétablir la couverture du risque d’émeutes dans tous leurs contrats, un point essentiel face à la multiplication des violences urbaines, notamment en Nouvelle-Calédonie et aux Antilles, qui avaient poussé certaines compagnies à exclure ce risque des polices d’assurance entreprises.
🏛️ Un modèle inspiré des catastrophes
Le dispositif bénéficierait d’une garantie de l’État, permettant aux assureurs de continuer à proposer des contrats complets sans craindre des pertes massives. La question de la répartition du risque s’avère cruciale, car certaines collectivités touchées par les émeutes de 2023 s’étaient retrouvées abandonnées par leurs assureurs, laissant un vide financier difficile à combler.
Un rapport publié l’an dernier sur l’assurabilité des collectivités recommandait déjà de créer un fonds sur le modèle des catastrophes naturelles ou des attentats. Les auteurs soulignaient la nécessité d’une “mutualisation du risque social exceptionnel”, avec des incitations à couvrir les zones les plus exposées. Comme le souligne un expert cité dans le rapport :
Ce mécanisme pourrait stabiliser le marché de l’assurance tout en protégeant efficacement les victimes.
Ce projet s’inscrit dans une logique économique et financière stratégique, visant à prévenir la volatilité des marchés d’assurance, sécuriser les acteurs privés et réduire le recours aux fonds publics d’urgence en cas de violences urbaines majeures.
👁️ L’œil de l’expert : trouver un équilibre
La mise en place d’un fonds de ce type constituerait un changement majeur dans la gestion des risques sociaux et urbains. Pour le secteur de l’assurance, c’est une opportunité de stabiliser les primes et d’éviter le retrait de couverture sur certains territoires. Pour l’État et les collectivités, c’est un outil de prévoyance financière qui limite le coût des émeutes pour les finances publiques.
On note que la mutualisation du risque et la surprime de 5 % représentent un équilibre subtil entre protection des victimes et viabilité économique des assureurs. Si le fonds voit le jour, il pourrait servir de modèle à l’international pour la couverture des risques liés aux violences urbaines et aux troubles sociaux.