La France s’apprête une nouvelle fois à vivre le rituel du passage à l’heure d’hiver, dans la nuit du samedi 25 au dimanche 26 octobre 2025. À 3h du matin, les horloges devront reculer d’une heure, offrant un peu de sommeil supplémentaire aux Français. Mais derrière ce geste devenu banal, c’est tout un débat économique et énergétique qui refait surface, alors que l’efficacité réelle du dispositif est de plus en plus contestée.
💡 Pourquoi et pour quel bénéfice ?
Le changement d’heure, instauré en 1916 puis réintroduit en 1975 sous Valéry Giscard d’Estaing, avait pour but de réduire la consommation d’électricité en optimisant l’usage de la lumière naturelle après le choc pétrolier. Depuis, le système a été harmonisé en 1998 à l’échelle européenne, afin d’éviter des transitions désynchronisées entre pays voisins.
Si à l’époque, les économies d’énergie semblaient notables, leur poids est aujourd’hui marginal. L’essor des appareils électroniques, de l’éclairage LED et des habitudes de consommation a profondément modifié la donne. Selon plusieurs études relayées par la Commission européenne, le gain énergétique du changement d’heure est aujourd’hui estimé à moins de 0,5 % de la consommation annuelle, soit une efficacité quasi résiduelle.
Pourtant, la contrainte reste lourde pour l’économie : désorganisation logistique (transports, aviation, fret), impact sur la productivité et perturbation des rythmes biologiques des travailleurs. Comme l’a rappelé un rapport parlementaire français, « les bénéfices énergétiques sont désormais marginaux au regard des coûts indirects sur la société et l’économie ».
🌍 Une tradition contestée mais difficile à réformer
Le système reste largement critiqué. En 2019, le Parlement européen a voté en faveur d’une suppression, mais aucun accord entre États membres n’a suivi. Déjà en 2018, une consultation publique avait recueilli 4,6 millions de réponses, dont 84 % opposées à la poursuite du dispositif. En France, une enquête de l’Assemblée nationale a abouti au même résultat.
Malgré cette contestation, le dispositif persiste dans une soixantaine de pays. Certains, comme la Russie, l’Islande ou la Tunisie, ont pourtant choisi d’y mettre fin, invoquant une simplification du quotidien et une stabilité économique accrue. Mais en Europe, la crainte d’un marché unique fragmenté — où chaque pays choisirait son fuseau horaire définitif — freine toute décision.
Les entreprises de transport, de logistique et de tourisme redoutent en effet des désynchronisations coûteuses, qui pourraient peser lourdement sur les échanges intra-européens. C’est l’une des raisons majeures pour lesquelles l’Union européenne peine à franchir le pas malgré une opinion publique largement favorable à l’abandon du système.
👁️ L’œil de l’expert : cher compromis
Le passage à l’heure d’hiver reste un rituel très visible mais de moins en moins pertinent sur le plan économique. Derrière l’argument de l’économie d’énergie, désormais caduc, se cachent en réalité des coûts invisibles pour les entreprises et la société. La France, comme ses voisins européens, devra tôt ou tard arbitrer entre le maintien d’une tradition obsolète et la nécessité d’une simplification économique et sociale.
En attendant une réforme européenne coordonnée, les Français devront encore jouer avec leurs horloges fin octobre — symbole d’un compromis qui coûte plus qu’il ne rapporte.