Une remontée qui inquiète ménages et investisseurs. La rentrée 2025 s’accompagne d’un signal préoccupant pour l’immobilier français : après une accalmie en début d’année, les taux de crédit repartent à la hausse. Depuis début septembre, plusieurs établissements bancaires ont ajusté leurs barèmes, brisant la tendance baissière observée depuis 2024. Résultat : pour les ménages, la facture d’un emprunt s’alourdit, et pour les banques, les marges de manœuvre se réduisent dans un climat économique et financier tendu.
Le cas de Jérôme et Charlène, un couple parisien cité par l’AFP, illustre cette nouvelle réalité : leur offre initiale à 3 % sur 20 ans a été revue à 3,15 %, soit un surcoût potentiel de 2 000 € par tranche de 100 000 € empruntés. Une hausse en apparence modeste, mais qui reflète une tendance structurelle pesant sur la solvabilité des ménages et sur l’attractivité du marché.
🔎 Les banques face au coût de la dette française
Les banques françaises empruntent une partie de leurs ressources directement sur les marchés financiers, avant de les prêter aux particuliers. La remontée des taux souverains français début septembre, sur fond d’incertitudes politiques et économiques, explique donc directement l’ajustement des conditions de crédit.
Comme le souligne Fabien MONVOISIN, CEO de Crédit Conseil de France:
Nous sommes face à un mur d’incertitudes tant économiques que politiques, qui provoque techniquement une remontée des taux, pouvant atteindre +0,25 point
Même constat du côté d’un autre courtier, qui rapporte que certaines banques justifient ces relèvements par « l’instabilité politique, les tensions sociales et la tension sur les marchés financiers ».
En conséquence, le taux moyen du crédit immobilier, qui se situait encore cet été juste sous les 3,10 % (hors assurance), pourrait grimper vers 3,25 % à 3,30 % d’ici la fin de l’année, selon Jean-Marc Vilon, directeur général de Crédit Logement. Côme Robet, président de la CNCEF, va plus loin en anticipant « un retour progressif vers 3,5 % sur 25 ans, avec des disparités régionales ».
🏠 Un marché immobilier fragilisé par la confiance en berne
Si le mois de juillet a marqué un record avec 13,1 milliards d’euros de nouveaux crédits à l’habitat – le plus haut niveau depuis deux ans et demi –, les spécialistes redoutent un simple « effet rattrapage » lié à la saison estivale. Les banques, désormais plus prudentes, exigent des dossiers solides et renforcent leurs critères d’octroi.
Fabien MONVOISIN, confirme ce durcissement :
Les établissements bancaires sont plus exigeants sur cette fin d’année, en demandant des garanties plus sérieuses (salaires, apport, etc…)
De plus, la confiance des ménages reste fragile : dans un contexte d’inflation encore volatile et de croissance atone, beaucoup hésitent à s’engager dans des projets de long terme.
Cette prudence inquiète aussi les analystes financiers. Dans une note récente, Moody’s avertit que la combinaison « d’une hausse des taux et d’un moral en berne » pourrait réduire la dynamique des prêts bancaires et freiner la reprise attendue du crédit immobilier dans les prochains trimestres.
👁️ L’œil de l’expert : vers 3,5%
La hausse des taux, bien que contenue pour l’instant, agit comme un signal d’alarme : le marché immobilier, déjà fragilisé par deux années de tensions, reste extrêmement sensible aux variations du coût de la dette. Pour les banques, c’est un exercice d’équilibriste entre préservation des marges et maintien du financement de l’économie. Pour les ménages, chaque hausse de 0,1 point peut représenter des milliers d’euros supplémentaires à rembourser sur la durée du crédit.
En clair, si la tendance se confirme et que les taux s’installent autour de 3,5 % en 2026, la reprise du marché pourrait être sérieusement compromise. Le crédit immobilier, pilier de l’investissement des ménages et moteur indirect de la croissance française, risque alors de connaître un nouvel épisode de ralentissement durable.