Longtemps cantonnée à une image vieillissante ou marginale, la voiture sans permis (VSP) vit aujourd’hui une métamorphose spectaculaire. En cinq ans, ses ventes ont bondi de 137 %, selon les données communiquées à RMC Conso par leboncoin. Portée par une nouvelle génération d’acheteurs urbains, l’électrification du marché et des modèles plus accessibles, cette transformation marque une rupture majeure dans les comportements de mobilité.
⚡ La révolution de la micro-mobilité
Entre 2019 et 2024, le nombre d’immatriculations de voitures sans permis est passé de 13 376 à 31 714 unités, d’après les chiffres de l’Argus relayés par leboncoin. Une envolée de 137,1 % en cinq ans, qui s’accompagne d’une offre d’occasion doublée sur la même période. Cette progression fulgurante s’explique autant par l’évolution de la demande sociétale que par la mutation industrielle du secteur automobile.
Le tournant décisif s’est opéré en 2020 avec l’arrivée de l’Ami de Citroën, véritable icône de cette révolution. Compacte, 100 % électrique, accessible dès 14 ans avec le permis AM, cette mini-citadine à 8 000 € seulement a séduit adolescents, parents et urbains connectés. Avec 75 km d’autonomie et une recharge complète en 4 heures, elle offre une alternative crédible au scooter, tout en réduisant les risques liés à la circulation urbaine.
La demande pour ces véhicules a augmenté de 45 % en trois ans sur leboncoin
souligne Olivier Flavier, directeur général de leboncoin auto. Une tendance qui s’explique aussi par un retour de la contrainte : délais record pour obtenir le permis, prix de l’essence, et recherche d’indépendance pour les plus jeunes.
La concurrence s’est rapidement intensifiée : Fiat a lancé sa Topolino, Renault sa Twizy et sa marque Mobilize le modèle Duo. Résultat : un marché en croissance annuelle de près de 20 %, où les constructeurs historiques comme Aixam et Ligier électrifient désormais leurs gammes. En 2024, une voiture sans permis sur deux vendue en France roule à l’électricité, contre à peine 20 % trois ans plus tôt.
🌍 Une niche qui s’impose comme tendance de fond
Certes, les voitures sans permis ne représentent encore que 0,5 % du marché automobile total, mais leur poids symbolique et stratégique s’accroît. Comme le rappelle Olivier Flavier, « il existe aujourd’hui deux profils d’acheteurs : les seniors ruraux, attachés au diesel pour son autonomie, et les jeunes urbains qui privilégient l’électrique pour des trajets courts ».
Cette dualité structure désormais le marché. En zone rurale ou périurbaine, la VSP compense l’absence de transports publics et les retards croissants pour passer le permis. Dans les grandes villes, elle s’impose comme un outil de mobilité douce, répondant aux restrictions de circulation et à la montée des zones à faibles émissions (ZFE).
Sociologiquement, la voiture sans permis devient une alternative réelle à la voiture traditionnelle, et non plus une solution de repli. Elle offre flexibilité, autonomie et sobriété énergétique à une population de plus en plus sensible à la mobilité durable.
👁️ L’œil de l’expert
Ce boom n’a rien d’un feu de paille. Il traduit une mutation structurelle du marché automobile : la recherche d’un modèle de mobilité plus compact, abordable et bas carbone. Toutefois, la pérennité de cette dynamique dépendra de deux leviers économiques : la capacité des constructeurs à contenir les coûts de production des versions électriques, et l’évolution du pouvoir d’achat des jeunes.
En d’autres termes, la voiture sans permis n’est plus un symbole de dépendance, mais bien celui d’une nouvelle liberté de mouvement — celle d’une génération qui veut rouler différemment, plus tôt et plus responsablement