Un dynamisme qui résiste… mais s’essouffle. La France reste une terre d’entrepreneurs, mais l’année 2025 révèle une fragilité croissante du tissu économique. D’après les données d’Infogreffe, le troisième trimestre a été marqué par une hausse spectaculaire des radiations et défaillances d’entreprises, signe que la conjoncture pèse lourdement sur les structures les plus fragiles. Inflation persistante, hausse des taux d’intérêt et recul de la consommation composent un cocktail explosif pour les TPE et PME françaises. Pourtant, paradoxalement, les créations d’entreprises continuent de progresser, traduisant une résilience économique aussi admirable que précaire.
📉 La vague noire des défaillances
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Entre le troisième trimestre 2024 et 2025, 73 508 radiations ont été enregistrées, soit une envolée de +24,9 % en un an. En ajoutant les radiations d’office, ce sont près de 98 000 entreprises qui ont disparu du paysage économique français.
Même constat du côté des procédures collectives : 13 240 sociétés ont été placées en redressement ou liquidation judiciaire, une hausse de +16,2 % par rapport à 2024. Ces faillites s’accompagnent d’un nombre croissant de contentieux financiers, avec 36 056 injonctions de payer et une augmentation de +19,6 % des privilèges du Trésor, sans oublier 3 139 privilèges de Sécurité sociale.
Selon les économistes, ces indicateurs traduisent un effet ciseau : les coûts d’exploitation explosent, alors que les marges fondent sous la pression d’un pouvoir d’achat en berne. Beaucoup d’entreprises ne parviennent plus à absorber les hausses de prix de l’énergie, des loyers ou du crédit.
Comme le souligne un analyste d’Infogreffe :
La trésorerie des petites structures est devenue la première ligne de fracture de l’économie française.
🚀 Un esprit entrepreneurial qui persiste
Face à cette morosité, l’autre facette du tableau surprend : la création d’entreprise ne faiblit pas. Le troisième trimestre 2025 a vu 145 491 nouvelles immatriculations, en hausse de +11,2 % sur un an. Plus de 38 % de ces créations concernent le commerce, confirmant que les Français continuent de miser sur l’initiative individuelle, même dans un climat économique tendu.
Les micro-entreprises restent la forme privilégiée, portées par leur souplesse juridique et leur faible coût d’entrée. Mais derrière cet élan, se cache une réalité plus nuancée : beaucoup de ces créations émanent de travailleurs en quête de revenus complémentaires ou de reconversions subies dans un marché de l’emploi encore instable.
Comme le résume un économiste interrogé par Les Échos :
L’entrepreneuriat français est porté à la fois par la passion et la précarité.
Cette dynamique à deux vitesses crée un paradoxe économique : d’un côté, une vitalité remarquable ; de l’autre, une vulnérabilité structurelle qui alimente un taux de défaillance élevé dès les premières années d’activité.
👁️ L’œil de l’expert : la survie avant la croissance
Ce que révèle 2025, c’est que la France reste un pays d’entrepreneurs, mais où l’écosystème économique manque encore de robustesse. Les défis à venir sont clairs :
renforcer l’accès au financement pour les jeunes entreprises,
simplifier les procédures administratives et juridiques,
et surtout, adapter les politiques publiques à la réalité des petits acteurs économiques.
Le risque, si rien n’est fait, est de voir se pérenniser un modèle de création destructrice, où chaque entreprise née en remplace une autre disparue. Dans ce contexte, le véritable enjeu n’est plus seulement de créer, mais de faire durer.