Alors que le climat politique et économique reste tendu, la Banque de France maintient le cap : la croissance du PIB français devrait atteindre 0,3 % au troisième trimestre 2025. Une prévision prudente mais ferme, confirmée ce jeudi dans son enquête mensuelle. Malgré les remous liés à la démission du Premier ministre Sébastien Lecornu et la persistance d’un sentiment d’incertitude, l’économie hexagonale semble résister. Entre résilience sectorielle et risques géopolitiques, la Banque de France, par la voix de son chef économiste Olivier Garnier, dresse un tableau nuancé mais optimiste.
🏗️ Des contrastes économiques
Selon les dernières données recueillies entre le 26 septembre et le 3 octobre, la conjoncture française reste marquée par une incertitude élevée, mais globalement stable. Pour Olivier Garnier, « les carnets de commandes et les prix suivent les tendances observées précédemment, confirmant la dynamique du trimestre ».
Mais derrière cette apparente stabilité, les disparités sectorielles se creusent. Le bâtiment, moteur traditionnel de l’économie, montre des signes de fatigue après trois mois soutenus. Le secteur publicitaire recule également, reflet d’un ralentissement des investissements des entreprises face à un contexte politique jugé “trop volatil”. Comme le souligne encore Olivier Garnier, « la publicité est souvent la première dépense que l’on coupe, surtout en période d’incertitude ».
D’autres branches, en revanche, affichent une meilleure santé. Les services marchands tirent profit d’un tourisme étranger toujours vigoureux, et l’aéronautique maintient sa trajectoire ascendante, soutenue par des carnets de commandes exceptionnels. À l’opposé, le textile-habillement, la chimie et le plastique pâtissent d’un ralentissement durable, impactés par la baisse de la demande intérieure et par les nouvelles tensions commerciales entre Washington et Bruxelles.
L’indicateur d’incertitude, sans même intégrer les derniers développements politiques, reste supérieur à celui observé après la dissolution de l’Assemblée nationale en juillet 2024. Cette persistance de la nervosité économique reflète une inquiétude diffuse du tissu industriel français.
↗️ Une croissance modeste mais sécurisée
Malgré ce contexte brouillé, la Banque de France maintient sa prévision de 0,3 % de croissance au troisième trimestre et table sur une progression annuelle de 0,7 % pour 2025. Un chiffre modeste, mais « largement acquis », selon Olivier Garnier, sauf choc majeur d’ici la fin de l’année.
Cette résilience s’explique notamment par une demande intérieure stable et une capacité d’adaptation accrue des entreprises. Beaucoup de PME et d’ETI, notamment dans les services et l’industrie aéronautique, ont su ajuster leurs stratégies de production et de prix.
Les économistes soulignent également l’effet protecteur des politiques budgétaires ciblées et de la désinflation progressive qui redonne un peu d’air aux ménages. Cependant, les tensions commerciales mondiales — notamment les nouveaux droits de douane américains — pourraient peser sur la compétitivité exportatrice dans les prochains mois.
Dans ce climat complexe, la croissance française reste fragile, portée davantage par la résistance des grands groupes que par un rebond généralisé. Comme l’indique Olivier Garnier, « le contexte reste incertain, mais les fondamentaux de l’économie française demeurent solides ».
👁️ L’œil de l’expert
L’économie française avance sur une ligne de crête : ni stagnation, ni reprise franche. La Banque de France joue un rôle d’équilibriste entre prudence et confiance.
D’un point de vue économique, 0,3 % de croissance peut sembler timide, mais dans un environnement mondial dominé par la volatilité politique, la crise énergétique et la montée du protectionnisme, il s’agit en réalité d’un signal de résilience. Les secteurs tournés vers l’export, notamment l’aéronautique et le tourisme, constituent des piliers de stabilité.
À moyen terme, la véritable question reste celle de la soutenabilité de la croissance française sans réforme structurelle. La productivité, l’investissement industriel et la transition énergétique seront les trois leviers décisifs pour transformer cette résistance conjoncturelle en reprise durable.