C’est désormais officiel : Jean Castex, ex-Premier ministre et actuel patron de la RATP, prend les commandes de la SNCF. Après plusieurs semaines d’attente, le Parlement a validé sa nomination, proposée par Emmanuel Macron, à une large majorité — 60 voix pour sur 83 votants au sein des commissions du Développement durable. Ce feu vert institutionnel met fin à un processus suspendu depuis l’été dernier.
🚆 Un enjeu tant politique qu’industriel
Selon un communiqué du Sénat, la candidature de Castex n’a pas rencontré les 3/5e d’oppositions nécessaires pour être rejetée, scellant ainsi sa désignation.
Derrière cette décision se cache un enjeu politique et industriel majeur : celui de redresser un groupe ferroviaire en quête d’équilibre entre ouverture à la concurrence, modernisation du réseau et viabilité financière. L’ancien locataire de Matignon, réputé pour son pragmatisme et son sens du dialogue social, incarne pour beaucoup une forme de continuité apaisée dans le monde du transport public.
Comme le souligne Capital, Emmanuel Macron « souhaitait initialement le nommer avant l’été », mais des retards institutionnels avaient repoussé le calendrier. Castex, de son côté, affirmait vouloir « assumer pleinement [ses] responsabilités à la RATP » jusqu’à la transition effective.
🚝 Concurrence, financement et climat social
La nomination de Jean Castex intervient dans un contexte particulièrement tendu pour la SNCF. Trois priorités se dessinent d’ores et déjà pour le nouveau dirigeant : l’ouverture à la concurrence, le financement du réseau et les négociations salariales.
Thomas Cavel (CFDT-Cheminots) prévient : « Plus que le casting, c’est la feuille de route qui comptera ». Le ton est donné. Les syndicats attendent des réponses rapides sur le partage du marché ferroviaire, la gestion de la dette et la politique salariale dans un climat social toujours sous pression.
Apprécié à la RATP pour sa capacité à nouer le dialogue, Jean Castex bénéficie paradoxalement du soutien inattendu de la CGT : Sophie Binet, sa secrétaire générale, aurait plaidé pour sa nomination à la SNCF. Une rare convergence dans un secteur où la défiance syndicale reste forte.
Selon Le Parisien, plusieurs sources internes à la régie de transport parisienne « regrettent déjà son départ ». Reste à savoir si ce capital de sympathie suffira à désamorcer les tensions sociales qui s’annoncent.
Par souci de transparence, Castex s’est engagé à se retirer des appels d’offres en cours entre la RATP et la SNCF, et à se déporter de tout dossier commun pendant trois ans. Une précaution saluée par la commission parlementaire, soucieuse d’éviter tout conflit d’intérêts entre deux géants publics à l’écosystème imbriqué.
👁️ L’œil de l’expert : une stratégie à définir
L’arrivée de Jean Castex à la SNCF ouvre un nouveau chapitre pour le transport ferroviaire français. Fort de son expérience à la RATP, il devra trouver le juste équilibre entre performance économique, stabilité sociale et ambitions écologiques.
L’État, principal actionnaire, attend de lui des résultats rapides sur la productivité, la rentabilité du réseau TGV et la transition énergétique du parc ferroviaire.
Mais le véritable enjeu sera politique : rendre le rail à nouveau attractif pour les usagers et crédible pour les investisseurs, dans un contexte européen où la libéralisation s’accélère. Comme souvent dans le ferroviaire, la voie semble tracée… mais semée d’aiguillages.