Un Noël au goût amer pour les consommateurs. Les fêtes de fin d’année approchent, mais une absence de taille trouble déjà la magie de Noël chez E.Leclerc : les traditionnels chocolats Lindt, symboles d’élégance gourmande, brillent par leur absence dans les rayons. Une situation inédite, d’autant plus surprenante que ces produits figurent chaque année parmi les meilleures ventes de saison.
Derrière ce vide sucré se cache un conflit économique majeur entre le distributeur français et le géant suisse du chocolat, sur fond de hausse record du prix du cacao et de tensions sur les marges. Ce bras de fer illustre un phénomène plus global : la guerre silencieuse entre industriels et distributeurs, chacun cherchant à préserver ses profits dans un contexte inflationniste tendu.
🎄 Un duel commercial au goût amer
En ce mois de novembre 2025, les clients de Leclerc découvrent avec étonnement des rayons de Noël amputés d’un symbole des fêtes : les célèbres chocolats Lindt, des Lindor aux Champs-Élysées, en passant par les Pyrénéens. Ce manque n’est pas dû à un problème logistique, mais bien à un désaccord économique majeur entre les deux groupes, révélateur des tensions croissantes dans le secteur de la grande distribution.
Selon plusieurs sources internes, Lindt et Leclerc n’ont pas réussi à s’entendre sur les conditions commerciales de cette fin d’année : prix de vente, marges et modalités de distribution. Résultat : les assortiments festifs de la marque suisse sont absents des gondoles de l’enseigne.
Un porte-parole du fabricant, basé à Oloron-Sainte-Marie (Pyrénées-Atlantiques), a confirmé que la production des chocolats de Noël avait été écourtée de deux mois face à un contexte économique particulièrement défavorable.
Cette situation n’est pas sans rappeler d’autres précédents : en 2023, Leclerc avait déjà suspendu la vente de produits Pernod Ricard après un conflit tarifaire similaire. Une stratégie de « déréférencement » souvent employée par le groupe pour faire pression sur les industriels, quitte à frustrer ses clients fidèles.
🍫 L’explosion des prix du cacao, un séisme pour toute la filière chocolatière
Derrière ce bras de fer, un facteur structurel pèse lourd : la flambée des cours du cacao. Entre janvier 2023 et janvier 2024, les prix ont bondi de 180 %, atteignant un record historique de 11 000 € la tonne, selon les chiffres communiqués par la direction de l’usine Lindt. En cause : des conditions climatiques désastreuses en Afrique de l’Ouest, notamment en Côte d’Ivoire et au Ghana, qui représentent plus de 60 % de la production mondiale.
Si les prix ont légèrement reflué depuis ce pic, les coûts de production demeurent très élevés. Les chocolatiers comme Lindt ont donc été contraints de répercuter partiellement cette hausse sur les prix de vente, provoquant la résistance des distributeurs.
Or, pour Leclerc, dont le modèle repose sur des prix bas et un pouvoir de négociation fort, accepter une telle inflation reviendrait à rogner sur ses marges et à fragiliser son image auprès des consommateurs.
Mais ce bras de fer illustre aussi une mutation plus profonde du marché agroalimentaire : les tensions entre fabricants et distributeurs s’intensifient à mesure que les matières premières se renchérissent. Comme l’explique un économiste du secteur, « chaque hausse du cacao, du blé ou du sucre devient désormais un levier de négociation commerciale, voire de confrontation ouverte entre industriels et distributeurs ».
👁️ L’œil de l’expert : un modèle sous tension
Cette absence des chocolats Lindt dans les rayons Leclerc ne relève pas d’un simple désaccord ponctuel : elle révèle les failles structurelles du modèle économique de la grande distribution française. Entre inflation persistante, hausse des coûts énergétiques et volatilité des matières premières, les marges s’érodent des deux côtés.
Pour Leclerc, préserver son image de champion du pouvoir d’achat impose des arbitrages radicaux, quitte à sacrifier des marques emblématiques. Pour Lindt, maintenir une qualité premium tout en absorbant l’envolée du cacao et de la logistique relève d’un exercice d’équilibriste.
À l’approche des fêtes, ce bras de fer met en lumière un enjeu stratégique : qui, du producteur ou du distributeur, fixera demain la valeur réelle du chocolat ?





