Une compagnie en turbulence financière prolongée. La suspension temporaire du certificat de transport aérien d’Air Antilles a provoqué un nouveau séisme dans le ciel caribéen. Alors que la compagnie tentait encore de retrouver une stabilité économique fragile, cette mesure administrative a stoppé net toute activité aérienne, accentuant les inquiétudes autour de sa viabilité. Dans un communiqué publié après l’annonce, et relayé par BFM Business, l’entreprise expliquait que l’audit réalisé début décembre avait révélé des « points de conformité à finaliser », sans en dévoiler les détails. Une situation qui plonge une fois de plus les liaisons inter-îles — vitales pour l’économie locale — dans l’incertitude.
🚨 Une suspension administrative qui ravive le spectre du naufrage financier
L’arrêt total des vols, effectif depuis lundi à minuit, crée un choc logistique majeur pour les milliers d’usagers dépendants des liaisons courtes entre la Guadeloupe, la Martinique, Saint-Martin et Saint-Barthélemy. Sur le plan réglementaire, la Direction de la sécurité de l’aviation civile (DSAC) exige désormais qu’Air Antilles corrige rapidement les anomalies documentaires et organisationnelles détectées par l’audit du 2 au 4 décembre — un impératif qui pèse sur une compagnie déjà fragilisée.
Un modèle économique sous tension depuis la liquidation du groupe CAIRE – Depuis la faillite en 2023 de sa maison mère, CAIRE, la survie d’Air Antilles repose essentiellement sur l’injection de capitaux publics. En juin 2024, la collectivité de Saint-Martin a engagé près de 20 millions d’euros pour relancer l’opérateur, invoquant la nécessité de maintenir la connectivité aérienne d’un territoire économiquement dépendant du trafic insulaire.
Louis Mussington, président du conseil territorial de Saint-Martin, résumait l’enjeu de manière très directe :
Il fallait tout mettre en œuvre pour sauver le soldat Air Antilles […] et permettre à nos concitoyens de se déplacer à un prix raisonnable
déclarait-il en octobre (propos relayés par BFM Business).
Conséquence immédiate : un transfert contraint des passagers vers Air Caraïbes – Air Antilles tente d’atténuer l’impact en réaffectant les voyageurs vers Air Caraïbes, la seule autre compagnie opérant les mêmes trajets. Mais cette dépendance accrue crée un quasi-monopole temporaire, ce qui fait craindre une hausse mécanique des prix et une déstabilisation supplémentaire du marché régional.
Une équation financière de plus en plus délicate – La compagnie, qui a transporté environ 100 000 passagers depuis le début de l’année, n’a toujours pas sécurisé l’arrivée d’un nouvel investisseur, condition indispensable pour consolider son avenir. Si sa licence avait été prolongée jusqu’au 31 janvier 2026, ce sursis apparaît désormais fragile tant que le certificat de transport aérien n’est pas restauré.
La suspension, même temporaire, entraîne une perte de revenus immédiate, rend la planification opérationnelle quasi impossible et renforce les doutes des partenaires financiers.
👁️ L’œil de l’expert : un modèle à repenser
La crise actuelle dépasse la simple problématique administrative : elle met en lumière la fragilité structurelle du transport aérien régional ultramarin. Air Antilles évolue sur un marché étroit, exposé à des coûts fixes élevés, à une saisonnalité forte et à une concurrence limitée. Sans recapitalisation robuste et stratégie industrielle claire, les risques de nouvelles interruptions demeurent élevés.
En clair : la survie d’Air Antilles ne dépend plus seulement de la conformité réglementaire, mais de sa capacité à reconstruire un modèle économique durable dans un écosystème ultramarin complexe

