La défaite politique de François Bayrou lors du vote de confiance, qui marque une première historique sous la Ve République, n’a pas empêché les marchés financiers de progresser lundi. Si les investisseurs avaient largement anticipé la chute du Premier ministre, c’est désormais l’incertitude sur la suite – et notamment sur la préparation du budget 2026 – qui capte l’attention des analystes et pèse sur certains secteurs stratégiques comme celui des titres-restaurant.
📊 Une Bourse résiliente face à l’instabilité
La place parisienne a surpris par son calme relatif. Le CAC 40 a clôturé en hausse de 0,78 % à 7.734,84 points, gagnant plus de 60 points sur la séance, malgré un contexte politique tendu. Vendredi encore, l’indice avait cédé 0,31 %.
Pour Alexandre Baradez, responsable de l’analyse marchés chez IG France, « il n’y a pas eu de publication vraiment majeure au niveau européen ». Selon lui, les opérateurs restent en mode attentiste, « sur une veillée d’armes » avant de mesurer les répercussions politiques et budgétaires des prochains jours.
En parallèle, les rendements obligataires français ont reculé légèrement : le taux à 10 ans s’est établi à 3,41 %, contre 3,45 % vendredi, tandis que son équivalent allemand est revenu à 2,64 %. Baradez nuance toutefois : ce repli est « davantage lié aux États-Unis, où les marchés anticipent une baisse des taux directeurs de la Fed d’ici fin 2025 ».
La stabilité des marchés actions traduit donc moins une confiance dans la politique française qu’une adaptation pragmatique des investisseurs, déjà préparés à un scénario de vacance du pouvoir.
🚨 Les titres-restaurant en chute libre
Si le CAC 40 a résisté, certains segments de la cote ont lourdement souffert. Les émetteurs de titres-restaurant ont accusé le coup, inquiets d’un nouveau retard dans la réforme de leur secteur.
Cette réforme, présentée fin juin par le gouvernement Bayrou, devait transformer en profondeur le dispositif : dématérialisation prévue dès 2027, élargissement de l’usage le dimanche et dans toute la France, ainsi que la confirmation de la possibilité d’utiliser ces titres pour les courses alimentaires en supermarché. Or, la chute du gouvernement fragilise son calendrier.
Résultat immédiat : Edenred, maison-mère du Ticket Restaurant, a cédé 3,65 % à 22,94 €, tandis que Pluxee (ex-Sodexo) s’est effondré de 6,91 % à 15,21 €. Pour les analystes, ces reculs traduisent la crainte d’un gel prolongé de la réforme, alors que le secteur avait déjà souffert de multiples reports liés à l’instabilité gouvernementale.
👁️ L’œil de l’expert : l’attente automnale
La démission forcée de François Bayrou ouvre une séquence d’incertitude politique dont les marchés, paradoxalement, semblent s’accommoder à court terme. La hausse du CAC 40 masque pourtant des fragilités sectorielles, notamment sur les valeurs directement liées à l’action gouvernementale.
Comme le résume un analyste parisien : « La Bourse réagit plus aux perspectives de taux américains qu’aux turbulences de Matignon. Mais les investisseurs savent qu’une instabilité prolongée pèserait tôt ou tard sur la dette française et sur des secteurs dépendants de la réglementation, comme les titres-restaurant. »
En clair, si les marchés actions gardent leur sang-froid, les prochaines semaines seront décisives : le budget 2026, les décisions des agences de notation – Fitch en tête – et les tensions sociales annoncées pourraient transformer la prudence actuelle en véritable volatilité.