Alors que le Premier ministre François Bayrou s’apprête à affronter un vote de confiance à haut risque, l’inquiétude dépasse le strict terrain politique. La présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde, a averti que les crises gouvernementales au sein de la zone euro « ont un impact évident sur l’économie ». Cette déclaration, faite sur Radio Classique, rappelle à quel point l’équilibre institutionnel est intimement lié à la confiance des marchés et aux conditions de financement de la dette publique.
📉 Instabilité politique et réactions des marchés
Depuis six ans à la tête de la BCE, Christine Lagarde souligne avoir constaté à plusieurs reprises que l’instabilité politique entraîne des secousses financières tangibles.
Les développements politiques, la survenance de risques politiques, ont un impact évident sur l’économie, sur l’appréciation par les marchés financiers des risques-pays
a-t-elle précisé. Concrètement, une chute du gouvernement Bayrou accentuerait la prime de risque française et pourrait déstabiliser le marché obligataire. La dette souveraine de la France, déjà scrutée de près par les agences de notation, verrait son coût de financement augmenter si les investisseurs anticipent une paralysie budgétaire ou une incapacité à mener les réformes.
Cette perception fragiliserait davantage une économie hexagonale déjà marquée par une croissance molle et une dette publique frôlant les 110 % du PIB. Dans un contexte où l’ensemble de la zone euro reste vulnérable aux tensions géopolitiques et énergétiques, la France ne peut se permettre une perte de crédibilité politique.
💶 FMI, finances publiques et crédibilité
Si la perspective d’une mise sous tutelle par le Fonds monétaire international a été évoquée dans le débat public, Christine Lagarde se veut plus nuancée. Elle rappelle que le FMI n’intervient qu’en cas de déséquilibres externes massifs :
Les pays demandent l’intervention du FMI dans des circonstances où la balance courante est gravement déficitaire et où le pays ne peut pas faire face à ses obligations : ce n’est pas le cas aujourd’hui de la France
a-t-elle observé. Cependant, elle insiste sur le fait que la responsabilité incombe à l’État de remettre de l’ordre dans ses finances. Selon elle, le FMI aurait sans doute cette réponse : « Les conditions ne sont pas remplies, organisez-vous vous-mêmes pour restructurer et pour mettre de l’ordre dans vos finances publiques. »
Autrement dit, pas de sauvetage international en vue, mais une exigence claire : assainir la trajectoire budgétaire pour éviter une spirale de défiance. Cela implique de fortes contraintes politiques, car tout nouveau gouvernement devra concilier consolidation fiscale et acceptabilité sociale, dans un contexte de tensions sur le pouvoir d’achat.
👁 L’œil de l’expert : la dette et les taux
La mise en garde de Christine Lagarde agit comme un signal aux marchés financiers : la France ne peut pas se permettre d’instabilité prolongée. Une chute du gouvernement Bayrou ne provoquerait sans doute pas un choc immédiat comparable à une crise de liquidité, mais elle minerait la confiance des investisseurs et pourrait rapidement renchérir le coût de la dette française.
Le risque principal réside moins dans l’intervention du FMI que dans la dégradation de la notation souveraine et l’augmentation des taux d’intérêt, qui pèseraient sur les marges budgétaires déjà réduites. À court terme, l’urgence pour la France est donc de rassurer les marchés en affichant un cap clair, sans quoi le coût économique de la crise politique dépasserait largement celui de l’échec parlementaire.