Connu pour ses accessoires abordables prisés des adolescentes, Claire’s France entre dans une zone de fortes turbulences économiques. L’enseigne, qui employait encore récemment 800 personnes dans près de 250 points de vente, est officiellement placée en redressement judiciaire. Une décision qui soulève de nombreuses interrogations sur la stratégie du groupe, l’impact de la concurrence asiatique… et les menaces sur l’emploi.
📉 Claire’s en redressement judiciaire : Revenus en déclin, bénéfices en trompe-l’œil
Alors que Claire’s France affichait encore un bénéfice net de 1,3 million d’euros fin 2024 – après 800 000 euros un an plus tôt – l’entreprise n’a pourtant pas échappé au dépôt de bilan. L’information, révélée par Delta FM et confirmée par l’AFP le 28 juillet 2025, souligne un paradoxe financier : une rentabilité apparente mais une santé économique vacillante.
Le Tribunal des activités économiques de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire le 24 juillet, déclenchant une période d’observation de six mois. À l’issue de cette phase cruciale, deux scénarios sont sur la table : soit un plan de continuation via un repreneur potentiel, soit une liquidation pure et simple, synonyme de fermeture.
Derrière la façade, les difficultés sont palpables. Les ventes de Claire’s France ont reculé de 142 millions à 132 millions d’euros en un an. Cette baisse est d’autant plus critique que l’activité de grossiste en Europe – 37 millions d’euros de chiffre d’affaires – constitue une part substantielle de la performance globale.
Selon Véronique Revillod, secrétaire générale de la fédération des services CFDT, « Claire’s France était encore bénéficiaire l’an dernier », ce qui rend d’autant plus floue la décision de placer la filiale en redressement. Une opacité que dénoncent également les représentants du personnel, inquiets du manque de transparence sur les finances internes.
🌩 Fermeture des magasins face à la concurrence asiatique ?
Le plus grand danger désormais ? Les licenciements massifs. L’avocat des salariés, Maître Khaled Meziani, redoute une vague de suppressions de postes :
Ils disent chercher un repreneur, mais j’ai bien peur qu’il y ait beaucoup de licenciements
a-t-il confié à l’AFP. La situation de Claire’s s’inscrit dans une crise plus large du retail physique en France, particulièrement dans le secteur de l’accessoire et du prêt-à-porter. Depuis 18 mois, des enseignes comme Jennyfer, Camaïeu ou San Marina ont connu des sorts similaires, étranglées par l’explosion de la concurrence asiatique ultra-low-cost, incarnée par Shein ou Temu. Ces plateformes proposent des milliers de références à des prix souvent imbattables pour les réseaux traditionnels.
À l’échelle internationale, la maison mère américaine de Claire’s est elle-même en détresse. Déjà protégée par le Chapter 11 en 2018, elle pourrait selon Bloomberg de nouveau solliciter cette procédure. L’impact cumulé des taxes douanières instaurées par Donald Trump sur les produits chinois – une source d’approvisionnement majeure pour l’entreprise – alourdit encore les difficultés du groupe.
👁️ L’œil de l’expert : un modèle à bout de souffle ?
Malgré une rentabilité affichée, Claire’s paie le prix d’un modèle fragilisé à la fois par la transformation digitale du commerce et par des mutations profondes des habitudes de consommation. Face à des géants digitaux capables de livrer en 48h des produits à moitié prix, l’enseigne peine à justifier son positionnement tarifaire intermédiaire.
Sauf retournement majeur ou rachat stratégique, la disparition de Claire’s France pourrait laisser un vide dans un segment déjà fragilisé, celui de l’accessoire de mode abordable en centre-ville. Mais plus encore, elle symbolise l’agonie d’un retail en mutation, où la survie passe désormais par une réinvention rapide, digitale et logistique.
