La France signe une progression du PIB de 0,3 % au deuxième trimestre 2025, selon les données confirmées par l’Insee. Une performance en apparence encourageante après le timide +0,1 % enregistré en début d’année. Pourtant, derrière ce chiffre se cache une dynamique bien plus fragile. La croissance repose essentiellement sur la variation des stocks, tandis que la consommation, l’investissement et le commerce extérieur affichent des signaux préoccupants. Entre incertitudes politiques et prudence des acteurs économiques, le moteur tricolore tourne encore au ralenti.
⏯ Des moteurs internes grippés
Si l’économie hexagonale a pu afficher une croissance trimestrielle, c’est avant tout grâce à la contribution des stocks (+0,5 point), un ressort conjoncturel qui ne garantit en rien la solidité de la reprise. Patrick Martin, président du Medef, l’a rappelé lors de la REF : cette dynamique relève d’un « restockage » qui peut tout autant refléter une anticipation de la demande… qu’un excès d’invendus.
Côté ménages, le signal reste faible. La consommation stagne (0,0 %), freinée par un effondrement des dépenses énergétiques (-2,4 %), partiellement compensé par un regain sur l’alimentaire (+1,6 %) et les services de restauration-hébergement (+2,3 %). L’épargne, en revanche, grimpe à 18,9 % du revenu disponible, traduisant une méfiance persistante malgré une légère amélioration du pouvoir d’achat (+0,2 %). Cette prudence des ménages limite fortement l’effet multiplicateur de la demande intérieure.
Du côté des entreprises, la tendance reste morose. L’investissement continue de fléchir (-0,1 %), confirmant une atonie déjà visible au premier trimestre. Patrick Martin n’a pas caché son inquiétude :
Quand toutes les fédérations, à une exception près, constatent un assèchement des carnets de commandes et des investissements, nous sommes sur un point de bascule.
🌍 Commerce extérieur en berne
Le commerce extérieur, censé être un relais de croissance, reste un handicap. Certes, les exportations rebondissent timidement (+0,5 %), mais les importations progressent deux fois plus vite (+1,3 %), aggravant le déficit de la balance commerciale (-0,3 point). Depuis le début de l’année, le commerce extérieur retranche 0,9 point à la croissance, contre +1,2 point pour les seuls stocks.
À cela s’ajoute une toile de fond politique incertaine. Le vote de confiance du 8 septembre cristallise les tensions : François Bayrou pourrait être fragilisé, ce qui, selon Patrick Martin, « va immanquablement peser sur la conjoncture ». Cette instabilité institutionnelle vient s’ajouter à la frilosité des investisseurs et des consommateurs, renforçant l’impression d’une croissance sous perfusion.
Les administrations publiques, de leur côté, soutiennent légèrement l’activité (+0,4 %), mais leur contribution ne suffit pas à compenser l’essoufflement des autres moteurs. Résultat : l’acquis de croissance pour 2025 atteint seulement 0,6 %, avec une dépendance disproportionnée aux stocks et une demande intérieure toujours en retrait.
👁️ L’œil de l’expert : une France malade
Cette photographie économique révèle une France en équilibre instable. Les stocks agissent comme un artifice conjoncturel qui masque mal la fragilité des piliers de la croissance. Avec des ménages prudents, des entreprises attentistes et un commerce extérieur déficitaire, l’économie française apparaît plus vulnérable qu’il n’y paraît. Dans ce contexte, les incertitudes politiques de la rentrée risquent d’ajouter une couche supplémentaire de volatilité. En d’autres termes, le léger rebond observé au printemps n’est pas encore le signe d’un redémarrage solide, mais bien celui d’un funambule avançant au-dessus du vide.