Dans un marché automobile européen sous tension, où l’inflation des coûts, les réglementations de sécurité et le prix des batteries font flamber les tarifs, Dacia crée la surprise. Le constructeur roumain du groupe Renault vient de dévoiler, à Meudon, son “Hipster Concept”, une micro-voiture 100 % électrique pensée pour un usage urbain — et surtout annoncée à moins de 15 000 euros. L’objectif : redonner de l’air au marché des véhicules électriques accessibles, alors que la voiture moyenne dépasse désormais les 30 000 €.
Entre sobriété industrielle, innovation réglementaire et pari sur un segment oublié, Dacia veut prouver qu’il est possible de concilier mobilité durable et pouvoir d’achat.
🔋 Le pari Dacia : la voiture électrique low-cost
Le “Hipster Concept” symbolise la philosophie Dacia : faire simple, efficace et économique. Long de 3 mètres et pesant moins de 800 kg, le prototype revendique un minimalisme assumé. Sa vitesse bridée à 90 km/h en fait un véhicule strictement urbain, mais capable d’accueillir quatre véritables passagers avec un espace intérieur étonnamment généreux.
Pour Katrin Adt, nouvelle directrice générale de la marque et ex-dirigeante de Mercedes-Benz, cette voiture représente “une vision audacieuse de Dacia pour une mobilité locale, abordable et quotidienne”. Et elle ajoute : “Nous disposons de tous les atouts pour concrétiser ce projet, si l’opportunité réglementaire se présente.”
L’économie est visible à tous les niveaux :
Une seule couleur, des vitres manuelles,
Des sangles à la place des poignées,
Des feux simplifiés, accessibles depuis la vitre arrière.
Autant de choix industriels qui réduisent les coûts de production et le poids, tout en rappelant la philosophie historique de la marque : le juste nécessaire, sans superflu.
Objectif clair : faire renaître la voiture du quotidien, loin des SUV énergivores et des citadines électriques à plus de 25 000 €. Avec une autonomie d’environ 150 km, la Hipster cible les familles en seconde voiture, les jeunes actifs ou encore les retraités — trois catégories souvent laissées pour compte par le marché électrique actuel.
🏭 Une bataille pour démocratiser l’électrique
Mais avant d’arriver sur nos routes, le “Hipster Concept” devra franchir une série d’obstacles. Le principal est réglementaire.
Renault et Stellantis mènent actuellement une campagne à Bruxelles pour la création d’une nouvelle catégorie de véhicules légers électriques, intermédiaire entre :
les quadricycles L7e (moins de 450 kg),
et les voitures M1 (segment classique, soumis à des exigences de sécurité très lourdes).
Cette “catégorie intermédiaire” — inspirée des Kei Cars japonaises — permettrait de s’affranchir d’une partie des équipements coûteux imposés par les normes M1, tout en restant sûre pour les passagers.
Une simplification cruciale pour produire des modèles abordables et viables économiquement.
David Durand, directeur du design de Dacia, souligne d’ailleurs :
Il faudra sans doute produire ce type de véhicule en Europe, ce qui impose de repenser tout le modèle industriel, et d’adapter les usines à petite échelle.
Outre le volet réglementaire, la hausse des coûts des matières premières et des batteries reste un défi majeur. D’après les chiffres communiqués par la marque, le prix moyen d’une voiture neuve a augmenté de 63 % entre 2001 et 2020, tandis que les voitures d’occasion ont pris 45 % en 14 ans.
Ce contexte rend la promesse d’un véhicule électrique sous les 15 000 € particulièrement stratégique : un levier anti-inflation pour le marché automobile européen.
Le “Hipster Concept” n’est donc pas qu’un projet d’image : il illustre une nouvelle approche économique de la mobilité, où les coûts de production, l’efficacité énergétique et la simplicité réglementaire s’articulent pour rendre l’électrique enfin accessible.
👁️ L’œil de l’expert : Dacia, pionnier d’une nouvelle ère
En lançant ce concept, Dacia s’installe à contre-courant d’un marché obsédé par la surenchère technologique et le luxe électrique. Là où les grands constructeurs visent la performance et les marges, la marque roumaine se positionne comme le fer de lance d’une sobriété industrielle rentable.
Si la nouvelle catégorie européenne voit le jour, le Hipster pourrait devenir le modèle emblématique d’une mobilité urbaine post-inflation — légère, pragmatique et locale.
Mais la réussite dépendra d’un fragile équilibre : concilier production européenne, prix plancher et contraintes réglementaires.
En somme, le Hipster Concept n’est pas seulement un véhicule : c’est un signal stratégique adressé au marché. Dacia rappelle que l’avenir de l’électrique ne passera pas uniquement par la technologie de pointe, mais aussi par la redéfinition intelligente du “moins”.