Une amélioration timide, mais une fragilité persistante. Le découvert bancaire reste une réalité pour une large partie des ménages français. D’après une enquête YouGov pour MoneyVox publiée jeudi, 31 % des Français ont été dans le rouge au moins une fois sur les douze derniers mois. Si ce chiffre marque une légère amélioration par rapport à 2023 (36 %), le problème demeure structurel. Comme le souligne MoneyVox, cette tendance s’explique notamment par le ralentissement de l’inflation, retombée à 0,9 % en rythme annuel en juillet dernier, ce qui a desserré l’étau budgétaire des ménages.
Mais derrière cette embellie relative se cache une donnée plus inquiétante : un quart des Français concernés par le découvert y sont confrontés tous les mois, soit près de 8 % de la population totale.
📊 Une pression moins forte, mais …
L’étude révèle que 49 % des personnes concernées imputent leur découvert à une situation financière durablement difficile, contre 53 % en 2023. Cette évolution confirme une respiration budgétaire permise par la décélération des prix, mais elle reste fragile.
Un autre enseignement de l’enquête réside dans la récurrence des découverts : 17 % des sondés déclarent tomber dans le rouge entre 5 et 11 fois par an, ce qui équivaut à environ 5,3 % de la population. Dans la plupart des cas, ces incidents restent absorbés par les découverts autorisés, dont bénéficient 90 % des clients. Cette marge de manœuvre accordée par les banques – souvent équivalente à 10 à 20 % du revenu mensuel net – permet de limiter l’impact en termes de frais.
Cependant, une autre réalité demeure : 35 % des personnes concernées dépassent parfois le plafond autorisé, ce qui entraîne agios et commissions d’intervention. À ce stade, la facture peut rapidement grimper, d’autant que les ménages en difficulté sont précisément ceux qui subissent ces coûts additionnels.
⚠️ Les frais bancaires, un cercle vicieux
Les dépassements de plafond déclenchent une cascade de pénalités : agios, forfaits minimums, rejets de prélèvements… Ces frais accentuent la précarité des ménages déjà fragilisés. En juin dernier, une proposition de loi déposée par des députés communistes visait à supprimer certaines de ces charges. Faute de majorité, le texte a été rejeté, laissant intact un système critiqué pour son caractère régressif.
Pour les banques, le découvert reste paradoxalement un instrument de gestion de la clientèle. Il assure une forme de flexibilité aux ménages, mais il alimente aussi un flux régulier de revenus issus des frais. Dans un contexte de ralentissement économique, ce modèle interroge sur sa soutenabilité sociale et sur la responsabilité des établissements financiers dans la prévention du surendettement.
👁️ L’œil de l’expert : un long chemin
Le léger recul du nombre de Français à découvert est un signal encourageant, mais insuffisant. L’économie domestique reste vulnérable : près d’un Français sur dix vit avec un découvert mensuel, révélant une fragilité structurelle du pouvoir d’achat. À l’heure où l’inflation reflue, le véritable défi n’est pas seulement conjoncturel, il est social. La dépendance au découvert traduit moins une erreur de gestion qu’un déséquilibre persistant entre revenus et charges fixes.
Pour les experts financiers, la solution passe par une réforme en profondeur du cadre bancaire, avec une meilleure régulation des frais et une pédagogie renforcée autour de la gestion budgétaire. Sans cela, les découverts resteront un miroir grossissant des inégalités économiques françaises.