Alors que l’Hexagone voit le rythme de ses défaillances ralentir légèrement (+8,2 % sur un an), les territoires ultramarins subissent une intensification préoccupante de la crise. Selon les derniers chiffres publiés par l’IEDOM et l’IEOM, pas moins de 2 605 entreprises y ont été placées en redressement ou liquidation judiciaire entre juin 2024 et juin 2025, soit une envolée de +10,8 %. Derrière ces statistiques, ce sont des pans entiers de l’économie – du BTP à la restauration – qui vacillent, fragilisant la croissance et l’emploi locaux.
🌍 Un choc sectoriel majeur sur l’économie ultramarine
Les secteurs les plus touchés traduisent une économie sous tension :
Hébergement-restauration : véritable point noir, avec une flambée de +55,5 % des défaillances, révélatrice d’une reprise touristique inégale et d’une trésorerie exsangue pour de nombreux établissements.
Services aux entreprises : les activités de conseil et prestations administratives enregistrent un bond de +22,1 %, signe que même les structures d’accompagnement manquent de résilience.
Construction : secteur déjà fragilisé par l’augmentation des coûts des matériaux et des retards de chantiers, il concentre un quart des faillites avec une hausse de +8 %.
À l’inverse, le commerce fait preuve d’une résilience relative, malgré une hausse limitée à +3,5 %. Mais cette résistance masque une situation précaire : beaucoup de commerces de proximité survivent grâce à des aides publiques ou à des trésoreries tendues.
Comme le souligne l’IEDOM, cette dynamique met en lumière « la persistance de déséquilibres structurels, aggravés par un contexte inflationniste et des coûts d’importation élevés ».
📊 La Guyane explose, La Réunion résiste
L’augmentation des procédures ne frappe pas tous les territoires avec la même intensité :
Guadeloupe : envolée de +28,5 %, avec un tissu économique fragilisé dans le commerce, la restauration et le conseil.
Guyane : situation critique, avec une hausse spectaculaire de +125,5 %, principalement tirée par le secteur du BTP.
Martinique : progression plus modérée (+8,8 %), mais toujours supérieure à la moyenne métropolitaine.
Polynésie française et Nouvelle-Calédonie : reprise des difficultés après plusieurs trimestres de recul.
La Réunion : exception relative, avec une hausse limitée à +3 % et 1 054 procédures sur l’année. L’île connaît un cinquième trimestre consécutif de ralentissement, après un pic fin 2024. Toutefois, la pression reste forte, en particulier dans le commerce et le bâtiment.
Mayotte : seul territoire à contre-courant, avec un recul de -17,4 %, mais un nombre de procédures marginal (38).
Ces disparités illustrent la fragilité structurelle des économies ultramarines, où la dépendance aux importations, la volatilité du tourisme et le coût de l’énergie pèsent plus lourdement qu’en métropole.
👁️ L’œil de l’expert : diversifier et sécuriser
La montée continue des défaillances en Outre-mer traduit une réalité : les plans de soutien ne suffisent plus à compenser les fragilités structurelles. Les chiffres de l’IEDOM/IEOM démontrent un décalage avec l’Hexagone, où la hausse des faillites tend à ralentir.
Pour un économiste, deux défis émergent :
La diversification économique : réduire la dépendance au tourisme et à la construction afin de limiter l’exposition aux chocs.
La sécurisation des trésoreries : faciliter l’accès au crédit et prolonger certains dispositifs de soutien pour éviter une vague de fermetures.
Sans mesures ciblées, le risque est celui d’une déstructuration du tissu économique ultramarin, avec un impact direct sur l’emploi et les finances locales.