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Photo d'un avion de type Boeing 787 Dreamliner, sur le tarmac d'un aéroport
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Boeing Salon du Bourget 2025 : Aucune commande et la débâcle économique pour l’avionneur

Un silence assourdissant dans le ciel du Bourget. C’est une image inédite et glaçante pour l’industrie aéronautique mondiale : au cœur du Salon international de l’aéronautique et de l’espace (SIAE) du Bourget, Boeing affiche un tableau de bord vide. Pas une seule commande, ni même un protocole d’accord à se mettre sous la dent. Un scénario sans précédent pour un groupe habitué aux joutes commerciales féroces avec Airbus. Mais en 2025, la réalité économique rattrape brutalement le géant américain, affaibli par une série noire d’incidents techniques, des retards industriels et un accident tragique impliquant un Dreamliner d’Air India. 

Derrière ce silence commercial, c’est l’image même de Boeing qui vacille, ainsi que l’un des piliers de l’économie industrielle américaine. À l’heure où Airbus engrange les contrats avec discrétion, l’absence de Boeing dans cette bataille d’annonces constitue un tournant stratégique, voire une alerte systémique.

 

⚡️Boeing au Salon du Bourget 2025 : un crash économique

Le Salon du Bourget 2025, traditionnel théâtre du duel entre Airbus et Boeing, s’annonçait comme un terrain d’opportunités commerciales majeures. Mais pour l’avionneur américain, cette édition tourne au cauchemar économique. Aucun contrat annoncé, aucune commande ferme ou protocole d’accord : un scénario inédit.

Nous nous concentrons sur le soutien à nos clients, plutôt que des annonces de commandes lors de ce salon

s’est justifié un porte-parole de Boeing dès l’ouverture du salon. Une déclaration qui résonne comme un aveu d’échec pour un constructeur en pleine tempête. L’absence du nouveau CEO Kelly Ortberg, qui a annulé sa venue dès le lendemain du crash d’un 787 Dreamliner d’Air India, illustre la gravité de la situation.

Selon Ken Herbert, analyste chez RBC Capital:

si l’absence de commandes de Boeing était inattendue, nous ne pensons pas qu’il s’agisse d’une surprise majeure compte tenu de la présence réduite de Boeing au salon cette année

La stratégie de repli est assumée, mais ses conséquences économiques pourraient être lourdes.

✈️ Le Bourget 2025 : thermomètre de la santé industrielle

Depuis 2010, le Salon du Bourget représente en moyenne 40 % des commandes annuelles de Boeing et d’Airbus, selon les calculs de la banque Jefferies. Ce rendez-vous biennal constitue un indicateur clé pour les carnets de commandes et les perspectives industrielles. Les six dernières éditions ont cumulé à elles seules 5.401 commandes, soit une moyenne de 900 avions par salon. Le record absolu reste 2023, avec 1.214 appareils commandés.

Mais en 2025, le compteur reste bloqué à zéro pour Boeing, une première historique. Même au plus fort de la crise du 737 MAX en 2019, l'avionneur avait quitté Le Bourget avec 282 commandes. Aujourd’hui, la donne a changé : chute de confiance des compagnies, image de marque ternie par les accidents, et une stratégie commerciale qui semble en retrait.

Nous avons été très touchés par le soutien de nos clients en cette période très difficile pour le groupe

déclarait Ihssane Mounir, ancien responsable des ventes, après le salon de 2019. En 2025, ce soutien ne semble plus aussi solide.

🔄 Le pari risqué de Boeing

Face à cet échec public au Bourget, Boeing pourrait compter sur un autre levier : les accords diplomatiques. Sous l’impulsion de Donald Trump, les commandes d’avions sont devenues un outil de négociation géopolitique. En témoigne une commande historique de 210 avions signée avec Qatar Airways, annoncée en grande pompe par le président lui-même.

Richard Aboulafia, expert du cabinet AeroDynamic, analysait récemment que les futures commandes « continueront à jouer un rôle stratégique pour les États-Unis, bien au-delà du simple cadre commercial ». Autrement dit, les carnets de commandes de Boeing pourraient se remplir ailleurs, loin des projecteurs du Bourget, sur des terrains où l’aviation se négocie dans les salons diplomatiques plus que sur les tarmacs.

Mais cette stratégie de contournement n’efface pas la réalité du marché : Le Bourget est une vitrine mondiale. Et l’absence totale de commandes pour Boeing en 2025 remet en question sa compétitivité, au moment où Airbus aligne les succès : 100 A321neo pour Vietjet, jusqu’à 50 A350-1000 pour Riyadh Air, ou encore une percée symbolique auprès de la compagnie polonaise LOT, fidèle à Boeing depuis 36 ans.

👁️ L’œil de l’expert : Alerte pour l’industrie aéronautique américaine

Ce zéro pointé au Bourget dépasse le simple revers commercial : il cristallise les fragilités croissantes de Boeing, déjà affaibli par des scandales techniques, des problèmes de qualité et une gouvernance sous pression. Si l’administration américaine peut jouer un rôle de bouclier à court terme, la perte de confiance structurelle du marché est une menace de long terme.

Airbus, de son côté, affiche une posture sobre. « Ce que je considère, c’est l’humilité, pas la complaisance », rappelait en 2024 Guillaume Faury, PDG de l’avionneur européen. Une stratégie payante, à l’heure où le leadership mondial dans l’aviation commerciale semble plus que jamais basculer d’un continent à l’autre.

À propos de l'auteur

Des années d’expérience et d’expertises financières, Fabien MONVOISIN est PDG du Groupe Win’Up composé de 4 enseignes spécialisées dans le regroupement de crédits, son ambition aujourd’hui est de décrypter l’actualité économique et financière dans l’objectif d’éclairer tous les Français