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Épargne populaire : le paradoxe français qui fait perdre des milliards

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Quand épargner rime avec s’appauvrir : dans un contexte d’instabilité économique marqué par une inflation persistante, l’épargne des Français se retrouve au cœur d’un paradoxe inquiétant : jamais les ménages n’ont autant mis de côté, et pourtant, leur argent perd en valeur réelle. Ce constat alarmant est mis en lumière par un rapport parlementaire de 97 pages présenté devant la Commission des finances de l’Assemblée nationale, fruit de 18 mois d’enquête par les députés Jean-Philippe Tanguy (RN) et François Jolivet (Horizons).

À travers leur analyse rigoureuse, les deux élus dénoncent l’effondrement du rendement réel de l’épargne populaire, gangrenée par l’érosion monétaire. Ils s’alarment notamment de 300 milliards d’euros de pouvoir d’achat envolés entre 2021 et 2023 – un phénomène qui frappe en priorité les classes moyennes et populaires.

Une épargne massive… mais qui coûte cher aux ménages 

Alors que la France figure parmi les pays de l’OCDE les plus portés sur l’épargne, en particulier chez les classes moyennes, les supports privilégiés – Livret A, PEL, assurances-vie en euros – rapportent de moins en moins. Selon les rapporteurs, plus de 6 000 milliards d’euros sont aujourd’hui placés par les ménages, dont près de 40 % détiennent des contrats d’assurance-vie.

Mais la réalité derrière ces chiffres est moins reluisante. Car cette épargne, bien que massive, est peu ou mal rémunérée. Jamais les Français n’ont autant épargné alors que rarement l’épargne n’a aussi peu rapporté, et même coûté !”, déplore le rapport signé par Tanguy et Jolivet. La faible rentabilité de ces produits d’épargne réglementée est systématiquement inférieure à l’inflation, ce qui revient à appauvrir lentement mais sûrement les épargnants.

La Banque de France confirme que le rendement réel du Livret A est négatif depuis 2016. Pire encore, les contrats d’assurance-vie en unités de compte ont perdu près de 8 % entre 1999 et 2021. Pour les parlementaires, ce sont les classes moyennes et populaires qui souffrent le plus de ce phénomène, car elles continuent d’épargner par réflexe sur des supports jugés « sécurisés« , sans être conscientes de la dévaluation de leur capital.

⚙️ Réformes nécessaires : vers une épargne plus lisible, mieux rémunérée 

Pour inverser la tendance, les deux députés avancent 19 recommandations concrètes, avec l’ambition de les faire intégrer à la prochaine loi de finances pour 2026. Parmi les propositions phares :

  • Rationaliser l’offre d’épargne réglementée : en réduisant le nombre de produits et en harmonisant leur fiscalité, pour améliorer visibilité et performance.
  • Garantir une rémunération réelle positive : en indexant les taux des produits réglementés sur l’inflation, afin de protéger les épargnants de l’érosion monétaire.
  • Réformer le Livret Jeune : en le rendant plus attractif, avec un plafond augmenté et un taux supérieur au Livret A, lié à la durée de détention.
  • Imposer aux banques de proposer les placements les plus adaptés à chaque profil, et supprimer les produits jugés obsolètes, comme le livret d’épargne entreprise.
  • Allouer les fonds de l’épargne réglementée à des investissements rentables et solides, pour une meilleure efficacité économique et sociale.

Enfin, les rapporteurs appellent à institutionnaliser un débat annuel au Parlement sur l’épargne des Français, afin d’assurer une veille régulière sur la performance et l’orientation de ces ressources stratégiques.

️ L’œil de l’expert : réconcilier sécurité et rentabilité, un impératif national

Ce rapport met en lumière une urgence financière invisible mais corrosive : celle d’un système d’épargne qui, sous prétexte de sécurité, grignote le patrimoine des classes moyennes et populaires. Alors que les Français continuent de faire confiance aux produits traditionnels, l’absence de transparence sur les rendements réels fragilise leur pouvoir d’achat et creuse les inégalités.

Repenser l’épargne populaire, ce n’est pas simplement une question de réforme technique, c’est un enjeu social et politique majeur. Il s’agit désormais de protéger le capital des ménages modestes, de rendre l’épargne à nouveau vertueuse, et de mettre les banques face à leurs responsabilités de conseil. Car une nation qui épargne doit pouvoir espérer en tirer profit — et non y perdre en silence.

Written by
Vanessa Vallée

Responsable du développement commercial au sein du Groupe Win'Up, Vanessa accompagne des entrepreneurs dans leur projet de création et participe au développement de la notoriété des enseignes du groupe. Sensible aux sujets économiques et financiers, Vanessa partage son avis sur les actualités.

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