Alors que les États-Unis traversent l’un des blocages budgétaires les plus graves depuis une décennie, la Maison-Blanche menée par Donald Trump transforme la crise en outil politique. Le pays vit un “shutdown” paralysant, mais le président républicain en profite pour lancer une purge sans précédent dans l’administration fédérale. Des milliers de fonctionnaires sont déjà licenciés, et plus de 10 000 suppressions de postes pourraient suivre selon le directeur du Bureau du budget, Russell Vought.
Une manœuvre à la fois politique et budgétaire, qui inquiète les marchés comme les institutions.
⚙️ Un “shutdown” transformé en arme
Depuis le 1er octobre 2025, les États-Unis fonctionnent sans budget voté. Les négociations entre républicains et démocrates se sont enlisées au Congrès, entraînant la fermeture partielle de nombreux services publics.
Conséquence directe : près de 1,4 million de fonctionnaires sont affectés.
Selon le Bipartisan Policy Center, 700 000 agents ont été mis en congé sans solde, tandis que 700 000 autres continuent de travailler sans rémunération.
C’est dans ce contexte que Russell Vought, bras droit budgétaire du président Trump, a décidé de profiter du chaos administratif pour réduire drastiquement la masse salariale fédérale.
Nous voulons être aussi tranchants que possible dans l’extinction de la bureaucratie
a-t-il déclaré sur le podcast Charlie Kirk Show, estimant que “le cap des 10 000 licenciements sera largement dépassé”. Cette stratégie radicale vise à redéfinir le périmètre de l’État fédéral, un vieux combat des conservateurs américains. Mais elle s’apparente aussi à un signal envoyé aux marchés financiers, inquiet d’un endettement public américain flirtant avec 35 000 milliards de dollars.
En limitant les dépenses publiques et en gelant les salaires, la Maison-Blanche cherche à contenir le déficit budgétaire, qui devrait dépasser 7 % du PIB en 2025 selon les projections du Congrès.
Cependant, une juge fédérale californienne, Susan Illston, a temporairement suspendu la mesure, la jugeant “contraire au droit du travail” et dénonçant une “utilisation abusive du shutdown pour contourner les lois”.
🚨 Gel des salaires, tensions sur les services et marchés nerveux
Au-delà du choc social, le shutdown pèse lourdement sur l’économie américaine. Les retards de paie, la baisse de la consommation publique et la paralysie de plusieurs ministères (Transport, Santé, Éducation, Logement, etc.) risquent de coûter plus de 1 milliard de dollars par jour au pays, selon les estimations de Moody’s Analytics.
Le FMI alerte déjà sur un impact direct sur la croissance, estimant qu’un mois de paralysie pourrait faire chuter le PIB américain de 0,3 point.
Les militaires américains, eux, ont été épargnés : Donald Trump a signé un décret pour garantir le paiement des 1,3 million de soldats en service actif, confirmant sur X (ex-Twitter) qu’ils “recevront leur solde le 15 octobre”.
Mais d’autres secteurs sont à la dérive. Le trafic aérien connaît des retards en chaîne à cause de l’absentéisme croissant des contrôleurs aériens et des agents de sécurité. Les bourses américaines ont enregistré une hausse de la volatilité, les investisseurs redoutant une contagion à la consommation des ménages et aux chaînes d’approvisionnement.
Les républicains, majoritaires au Sénat, plaident pour un budget à dépenses constantes, tandis que les démocrates exigent des crédits supplémentaires pour les programmes sociaux et de santé. Mais Donald Trump campe sur sa position : pas de compromis tant que le shutdown reste en place, quitte à prolonger l’asphyxie budgétaire jusqu’à l’hiver.
👁️ L’œil de l’expert : une stratégie à haut risque
Mais si cette politique séduit une partie des électeurs républicains, elle pourrait se retourner contre l’économie américaine à court terme.
Le risque majeur réside dans la perte de confiance des investisseurs : un pays incapable de voter un budget stable envoie un signal d’instabilité politique et institutionnelle. À moyen terme, les licenciements massifs dans la fonction publique risquent d’affaiblir la demande intérieure, aggravant les tensions sur la croissance.
Aux yeux des analystes, Donald Trump joue une partie de poker budgétaire : s’il parvient à relancer la machine en réduisant les dépenses publiques, il renforcera son image d’homme fort. Mais en cas d’échec, il pourrait précipiter les États-Unis dans une récession politique et sociale dont la facture dépasserait de loin les économies réalisées.