Après une période de modération durant l’inflation, les banques françaises font désormais flamber leurs tarifs de services. En 2025, les frais bancaires connaissent une hausse inédite, largement supérieure à l’inflation. Selon les dernières données du Comité consultatif du secteur financier (CCSF), les établissements ont engagé un rattrapage massif : les coûts supportés par les consommateurs bondissent jusqu’à +9 % en un an, révélant un virage stratégique du secteur bancaire. Une évolution qui interroge sur la rentabilité des banques, leur position concurrentielle, mais aussi sur le pouvoir d’achat des ménages.
🏦 Les banques comblent leurs pertes
Pendant la flambée inflationniste de 2022-2023, les établissements bancaires avaient choisi la prudence : maintenir des tarifs stables pour éviter la grogne des clients. Mais cette modération n’aura été que temporaire. Entre juin 2024 et juin 2025, les tarifs bancaires ont progressé en moyenne de +3,1 %, selon l’Observatoire du CCSF, contre +1 % seulement pour l’inflation générale. Sur deux ans, la hausse cumulée atteint +6,2 %, soit près du double de la progression des prix à la consommation.
Ce rattrapage est assumé : selon le CCSF, « la moitié des établissements ont relevé leurs tarifs, parfois de plus de 20 euros par an, notamment sur les frais de tenue de compte ». Concrètement, ces frais sont passés de 18,47 euros fin 2023 à 21,78 euros au 1er avril 2025, soit une augmentation de 14,7 % depuis 2017.
Les cartes bancaires internationales suivent la même tendance avec près de +3 % de hausse sur un an. Les virements en agence grimpent aussi de +6 % entre 2023 et 2024, puis encore +4 % depuis janvier 2025.
Selon les données du CCSF, 10 des 14 principaux services bancaires voient leurs prix augmenter, confirmant une stratégie globale d’ajustement. Derrière cette remontée tarifaire, se cache une logique financière : compenser les pertes subies durant la période d’inflation et préserver les marges des établissements dans un contexte de resserrement monétaire et de baisse des volumes de crédit.
C’est une correction tarifaire attendue : les banques avaient gelé leurs prix face à l’inflation, elles reprennent aujourd’hui ce qu’elles avaient différé
analyse un expert du secteur cité par le CCSF.
⚖️ Stabilité tarifaire pour les clients fragiles
Cette flambée des frais n’est toutefois pas uniforme. Les établissements mettent en avant une modération ciblée pour certaines catégories de clients. Ainsi, les offres dédiées aux clientèles fragiles restent stables, facturées en moyenne 12 euros par an, soit trois fois moins que le plafond réglementaire.
Le CCSF note également une baisse de 5,8 % des minima forfaitaires appliqués sur les petits découverts (inférieurs à 400 €). Ces frais passent de 6,42 euros en 2023 à 6,05 euros en 2025, traduisant une volonté affichée de préserver les ménages les plus vulnérables.
Malgré ces efforts, la hausse généralisée des frais courants impacte fortement les budgets. Les ménages subissent une érosion silencieuse de leur pouvoir d’achat bancaire, notamment pour les opérations classiques : virements, gestion de compte ou retraits internationaux.
Les associations de consommateurs pointent une opacité persistante dans la présentation des tarifs, compliquant la comparaison entre établissements.
Pourtant, le CCSF relativise la tendance : « Sur dix ans, la hausse totale des services bancaires (+17,6 %) reste inférieure à l’inflation générale (+20,8 %) ». Un constat statistique qui peine à masquer la perception de hausse rapide vécue par les clients depuis 2024.
👁️ L’œil de l’expert : un équilibre délicat
Les banques françaises naviguent entre deux impératifs : restaurer leurs marges et préserver la relation client. Cette politique de rattrapage tarifaire traduit une recomposition économique du secteur, dans un contexte de taux d’intérêt élevés et de digitalisation accrue.
Cependant, le risque est réel : une perte de confiance et une migration accrue vers les banques en ligne, souvent plus compétitives.
Pour les consommateurs, cette hausse marque un tournant : maîtriser ses frais bancaires devient une nouvelle dimension du pouvoir d’achat. Les établissements, eux, doivent désormais prouver que cette inflation tarifaire s’accompagne d’une valeur ajoutée tangible — services renforcés, sécurité, innovation — sans quoi la défiance pourrait s’accentuer.