L’exportation des vins et spiritueux français vers les États-Unis fait face à un nouveau coup de massue. Malgré un accord de principe annoncé le 27 juillet entre Donald Trump et Ursula von der Leyen, l’espoir d’une exonération fiscale pour les alcooliers français s’est évaporé. À compter de ce vendredi 1er août, un droit de douane unique de 15 % est appliqué à tous les produits du secteur, scellant une décision qui inquiète profondément les professionnels de la filière. Et ce, dans un contexte de taux de change défavorable et de marges déjà fragilisées.
⛈ Une sanction douanière aux conséquences immédiates
Derrière les discours diplomatiques, la réalité commerciale est brutale. L’augmentation des droits de douane à 15 % sur les vins et spiritueux importés aux États-Unis met un coup d’arrêt aux ambitions des exportateurs français. Pour Gabriel Picard, président de la Fédération des Exportateurs de Vins et Spiritueux (FEVS), « cette hausse représente un choc extrêmement violent pour la filière », tant en France qu’outre-Atlantique.
Depuis le 1er avril dernier, un taux de 10 % avait déjà été instauré par l’administration Trump dans un esprit de réciprocité tarifaire. L’accord conclu en juillet, censé assouplir les tensions commerciales, n’a finalement débouché que sur un taux uniformisé mais alourdi à 15 %, avec aucune exemption immédiate pour les produits traditionnels européens.
La Commission européenne, interrogée par Ouest-France, admet qu’« il ne faut pas s’attendre à ce que les vins et spiritueux figurent dans la première vague d’exemptions américaines » mais affirme poursuivre les négociations pour sécuriser des dispenses futures.
💵 Change + hausse des prix = la double peine
Au-delà des taxes douanières, c’est l’effet combiné du taux de change qui risque d’amplifier le choc pour les producteurs français. Jean-Marie Fabre, président des Vignerons indépendants de France, avertit que les prix à l’importation pour les consommateurs américains pourraient bondir de 30 % au total. Le dollar fort, couplé aux droits de douane, exerce une pression insoutenable sur la rentabilité.
Si l’on veut continuer d’exporter vers ce pays, on va devoir encore réduire nos marges
explique-t-il. Une logique qui met en péril la compétitivité des producteurs indépendants, déjà affaiblis par les fluctuations du marché post-Covid et les nouvelles normes commerciales internationales.
Chez Giffard, entreprise angevine qui réalise environ 15 % de son chiffre d’affaires aux États-Unis, la codirectrice Émilie Giffard exprime sa prudence :
Nous attendons les confirmations officielles. Il y a eu beaucoup d’aléas ces derniers mois. Si cela se confirme, nous allons travailler avec nos importateurs américains pour nous adapter.
👁️ L’œil de l’expert : « la sale guerre«
L’instauration d’un droit de douane unique à 15 % sur les alcools français révèle une stratégie américaine de pression continue sur les produits à forte valeur ajoutée de l’Union européenne. Derrière l’objectif affiché d’harmonisation tarifaire, c’est bien une guerre commerciale d’usure qui se poursuit.
Dans un secteur où les marges sont étroites et les cycles de production longs, cette surcharge fiscale pourrait entraîner un repli des exportations, une perte de compétitivité et à terme, une fragilisation durable de la filière viticole française.
Le scénario du pire ? Que ces 15 % deviennent structurels, sans compensation ni exemption. Dans ce cas, seuls les producteurs capables de restructurer leur modèle économique et de diversifier leurs marchés pourront absorber le choc. Le reste risque de se heurter à un mur tarifaire infranchissable.