Confronté à une érosion continue du marché du vin et à la pression de nouveaux modes de consommation, le caviste Nicolas change de cap — et de nom. Rebaptisé « Maison Nicolas », l’enseigne centenaire engage un vaste plan de transformation destiné à retrouver le chemin de la croissance dès 2026. Dans un contexte de consommation sous tension et d’inflation persistante, la nouvelle direction, menée par Cathy Collart Geiger, mise sur une refonte profonde de l’identité, des gammes et du modèle de distribution. Objectif : regagner du terrain sur un marché du vin en perte de vitesse et repositionner la marque entre tradition et modernité.
📉 Un marché du vin en déclin et un modèle à bout de souffle
Le constat est sans appel. « Le marché du vin décroît, donc c’est la même tendance pour Nicolas », reconnaît Cathy Collart Geiger, directrice générale du groupe depuis avril dernier. En perte de vitesse depuis la crise sanitaire, l’enseigne a fermé plus de magasins qu’elle n’en a ouvert, malgré un réseau encore conséquent de 478 points de vente en France et 80 à l’étranger, pour un chiffre d’affaires d’environ 300 millions d’euros.
Derrière ce recul se cachent plusieurs facteurs économiques. D’abord, l’inflation persistante a pesé lourdement sur le budget des ménages, poussant les consommateurs à revoir leurs arbitrages. Le vin, produit symbolique mais non essentiel, en a fait les frais. Ensuite, le groupe reconnaît ne pas avoir pris certains virages stratégiques, notamment le numérique et la diversification des gammes.
Un certain nombre de virages qu’on n’a pas pris, le digital, les nouvelles gammes… Tout cela cumulé fait qu’on est en perte de vitesse
admet Mme Collart Geiger. L’enseigne, détenue depuis 1988 par la famille Castel, peine également à rivaliser avec la grande distribution, qui détient la majorité du marché. Malgré ses 10 % de part de marché, Nicolas doit désormais réinventer son rôle dans un univers concurrentiel transformé où les ventes en ligne et les nouvelles habitudes de consommation — bières artisanales, cocktails prêts à boire, vins sans alcool — gagnent du terrain.
🚀 Nouvelle identité, nouvelle stratégie
Pour enrayer la spirale négative, Maison Nicolas lance un plan de transformation sur cinq ans, avec un objectif clair : gagner 5 % de clients par an et renouer avec la croissance d’ici 2026.
Ce plan repose sur plusieurs axes :
Une nouvelle identité visuelle et commerciale : le nom « Maison Nicolas » marque un retour à l’ADN originel de l’enseigne créée en 1822, tout en s’adaptant à une clientèle moderne. Le nouveau logo, bordeaux et blanc, affiche une silhouette de petit caviste, symbole de proximité et de savoir-faire.
Une offre adaptée aux territoires et aux tendances : chaque point de vente proposera désormais une sélection ajustée à son environnement local, avec davantage de vins d’entrée de gamme, une montée en puissance des bières artisanales et une ouverture vers les boissons sans alcool, reflet d’une consommation plus raisonnée.
Un virage digital assumé : développement du e-commerce, création d’une application mobile et projet de livraison nationale, autant de leviers destinés à moderniser l’expérience client.
Une politique RH repensée : l’entreprise mise sur la mobilité interne et la valorisation des talents, afin de renforcer la cohésion d’un groupe en mutation.
Comme le souligne Cathy Collart Geiger, cette refondation vise à « parler au quotidien des gens », en rapprochant davantage la marque de ses consommateurs tout en réaffirmant son savoir-faire historique.
👁️ L’œil de l’expert : un virage nécessaire
Le repositionnement de Maison Nicolas intervient à un moment charnière pour la filière viticole française, confrontée à un double choc structurel : la baisse tendancielle de la consommation de vin (-15 % en dix ans) et la montée en puissance de nouvelles attentes clients (prix, éthique, digital).
Selon les analystes du secteur, la stratégie de diversification engagée par Cathy Collart Geiger est cohérente sur le plan économique, mais son succès dépendra de la vitesse d’exécution et de la clarté du positionnement. En effet, l’enseigne devra trouver un équilibre délicat entre modernité et fidélité à son image patrimoniale, tout en affrontant la concurrence des pure players du vin en ligne.
En résumé, « Maison Nicolas » n’a pas seulement changé de nom : elle change de modèle. Si la transformation est bien menée, elle pourrait faire de l’enseigne un acteur clé de la renaissance du commerce de proximité, mais dans le cas contraire, elle risquerait d’incarner le symbole d’une tradition en quête d’avenir.