Le géant français de la promotion immobilière traverse une phase charnière. Après neuf mois marqués par un recul de 20 % de son chiffre d’affaires, Nexity poursuit une profonde transformation de son modèle économique. Entre recentrage sur les métiers à forte valeur ajoutée, désendettement progressif et nouveaux partenariats structurants, le groupe mise sur une stratégie d’adaptation face à un marché résidentiel en pleine mutation. Sous la houlette de Véronique Bédague, la priorité est claire : retrouver une rentabilité durable tout en consolidant sa position de leader dans un secteur chahuté.
💸 Acquisitions ciblées et cessions massives
Si Nexity affiche un chiffre d’affaires de 1,934 milliard d’euros sur les neuf premiers mois de 2025, soit une baisse de 20 % sur un an, le groupe a choisi d’assumer ce repli au nom d’une logique de sélectivité financière. L’année a en effet été marquée par une série d’opérations destinées à optimiser son portefeuille d’activités.
Côté acquisitions, Nexity a renforcé sa participation dans Angelotti, passant de 55 % à 80 % du capital. Cette montée en puissance, qui alourdit la dette financière nette (DFN) de 45 millions d’euros, dont 20 millions non cash, témoigne d’une volonté claire : accroître son ancrage dans l’aménagement et la promotion foncière, piliers historiques du groupe.
Mais parallèlement, Nexity a engagé une politique de cessions stratégiques. Après s’être séparé d’ADB et NPM en 2024, le groupe a finalisé la vente d’Accessite le 1er octobre 2025, suivie de Week’in au troisième trimestre. Ce mouvement de « nettoyage de portefeuille » répond à une ambition : concentrer les ressources sur les segments les plus rentables.
Cette approche illustre un recentrage assumé et lucide dans un contexte de raréfaction de la liquidité et d’une sélectivité de ce fait devenue primordiale. En d’autres termes, Nexity prépare son redémarrage en consolidant ses fondamentaux avant de renouer avec la croissance.
Malgré la contraction de ses revenus, la direction affiche son optimisme prudent :
Notre priorité reste la profitabilité opérationnelle, à condition que le contexte macroéconomique reste stable
indique le groupe. Une façon de rappeler que la trajectoire de redressement dépendra aussi de la résilience du marché immobilier français.
🏡 Reprise des accédants et pari sur les partenariats
Alors que la fin du dispositif Pinel a provoqué une chute de 45 % des investisseurs particuliers, Nexity mise sur la relance de la demande des accédants à la propriété pour stabiliser son activité. Sur les neuf premiers mois de 2025, les ventes aux primo-accédants ont bondi de 26 %, soutenues par la stabilisation des taux autour de 3,1 % et l’effet levier du prêt à taux zéro (PTZ).
Le groupe entend capitaliser sur cette dynamique en diversifiant ses relais de croissance. Un partenariat stratégique avec Carrefour a ainsi été annoncé, visant à développer de nouveaux projets immobiliers sur des fonciers commerciaux sous-utilisés. Ce partenariat pourrait générer plus de 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires sur dix ans, renforçant la visibilité du carnet de commandes et la solidité de la trésorerie à moyen terme.
Autre levier clé : la nouvelle gouvernance, mise en place fin septembre 2025. Dirigé par un comité exécutif de sept membres autour de Véronique Bédague, le nouveau modèle organisationnel repose sur une approche multiproduit par région, plus agile et adaptée aux spécificités locales. Cette refonte structurelle vise à mieux capter la demande dans les segments porteurs, notamment les terrains à bâtir (+41 %), les résidences étudiantes (98 % de taux d’occupation) et le coworking (85 %).
Mais tout n’est pas gagné. Les incertitudes liées aux échéances municipales de 2026 pourraient ralentir la délivrance des permis de construire, tandis que les tensions macroéconomiques pèsent encore sur la confiance des ménages. Nexity doit donc manœuvrer finement entre innovation, prudence financière et opportunisme commercial.
👁️ L’œil de l’expert
Dans un marché immobilier en recomposition, Nexity choisit la discipline plutôt que la croissance à tout prix. La baisse du chiffre d’affaires n’est pas le symptôme d’un affaiblissement, mais plutôt le signe d’une mue structurelle, visant à redéfinir le périmètre d’activité autour des pôles les plus rentables et les plus résilients.
Derrière la contraction conjoncturelle, se dessine une trajectoire de retour à l’efficacité économique. Les cessions ciblées libèrent des marges de manœuvre, les partenariats structurants comme celui avec Carrefour ouvrent des perspectives à long terme, et la nouvelle gouvernance offre un cadre plus réactif.
En somme, Nexity s’installe dans une stratégie de résistance intelligente : absorber le choc du marché tout en préparant les fondations d’une croissance qualitative. Si la conjoncture se stabilise et que les taux demeurent modérés, le groupe pourrait bien redevenir, dès 2026, le catalyseur de la relance immobilière française.





