Une opération XXL qui bouleverse le marché de la mode low-cost. L’univers du prêt-à-porter connaît un nouvel épisode marquant : l’enseigne française Noz, spécialiste du déstockage, va écouler près de 2 millions de pièces de la marque Jennyfer dès la fin septembre. Ces articles, principalement issus des collections 2024-2025, ont été acquis lors d’une vente aux enchères organisée après la liquidation de l’enseigne de mode.
Pour Noz, qui dispose de 346 points de vente en France, l’opération illustre une stratégie commerciale offensive : transformer les échecs du secteur textile en opportunités financières.
Comme le rappelle le communiqué du 15 septembre, la promesse est claire : des rabais allant jusqu’à -75 %, avec des jeans affichés à 6,50 € au lieu de 25,99 € ou encore des vestes proposées à 7,50 € contre près de 30 € en boutique. Une mécanique qui attire à la fois les consommateurs en quête de bonnes affaires et les investisseurs observant la montée en puissance d’un acteur capable de capitaliser sur les défaillances de ses concurrents.
📉 Jennyfer : faillite d’une enseigne emblématique du textile
Fondée en 1984, Jennyfer avait bâti son image sur la mode accessible aux jeunes générations. Avec 220 magasins en France et 80 à l’international (Belgique, Espagne, Maghreb), la marque réalisait encore près de 250 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel à la mi-2024. Mais la pression accrue de la fast fashion et la transformation digitale ratée ont fini par plomber ses comptes.
La liquidation judiciaire prononcée début 2025 a marqué la fin d’un modèle économique essoufflé, malgré la reprise partielle orchestrée par le groupe Beaumanoir (propriétaire de Bonobo, Cache Cache et Caroll). « Jennyfer a payé le prix d’un marché saturé, où seuls les acteurs les plus agiles survivent », explique l’analyste textile Sophie Lambert.
En clair, la chute de Jennyfer a généré une masse d’invendus, transformée en opportunité pour des acteurs spécialisés comme Noz, qui en font désormais un produit d’appel majeur pour dynamiser leur trafic en magasin.
💰 Noz : le modèle gagnant du déstockage
Créée en 1976 sous le nom « Le Soldeur », l’enseigne Noz s’est imposée comme la référence française du déstockage, avec un modèle simple : racheter des invendus, des excédents de production ou des surplus logistiques, puis les écouler à prix cassés.
La stratégie est redoutable :
Achat à bas prix lors de ventes aux enchères ou de cessions massives, ce qui limite le risque financier.
Marge garantie grâce à une décote massive sur les prix publics initiaux, tout en restant attractive pour le consommateur.
Croissance soutenue, avec aujourd’hui 346 magasins sur le territoire, et une clientèle fidélisée par l’effet « chasse au trésor ».
Cette acquisition du stock Jennyfer illustre parfaitement le positionnement de Noz : profiter des turbulences du secteur pour renforcer son image et ses résultats financiers. « Le déstockage est plus qu’un commerce d’appoint, c’est devenu un secteur stratégique en période d’inflation », analyse Marc Delattre, expert en distribution.
👁️ L’œil de l’expert
La récupération des invendus Jennyfer par Noz montre à quel point le marché de la mode est polarisé : d’un côté, les géants internationaux de la fast fashion, ultra-digitalisés et agressifs, de l’autre, des acteurs de niche qui capitalisent sur les faillites et la surproduction.
Dans ce contexte, Noz s’affirme comme un acteur contra-cyclique : plus les enseignes traditionnelles souffrent, plus ses opportunités se multiplient. Pour les consommateurs, c’est une aubaine; pour l’économie du secteur textile, c’est le reflet d’un marché profondément fragilisé, où les équilibres financiers ne tiennent plus que par la vitesse d’adaptation.
