Alors que François Bayrou, Premier ministre, multiplie les appels à la discipline budgétaire au niveau national, sa propre ville, Pau, est au cœur d’une controverse explosive. Depuis son arrivée à la mairie en 2014, l’endettement municipal par habitant a quasiment doublé, passant de 760 € à 1 440 € en 2023. Une trajectoire qui contraste fortement avec la stabilité observée dans le reste du pays. Derrière ces chiffres se dessine un débat brûlant : entre investissements structurants pour enrayer le déclin d’une ville moyenne et accusations de dépenses d’image, Pau devient le symbole d’une contradiction entre discours et pratique financière.
⚡️ Des finances locales sous tension
La photographie budgétaire de Pau illustre un décalage frappant avec les tendances nationales. En moins de dix ans, la dette par habitant est passée de 760 € à 1 440 €, quand la moyenne française s’est limitée à une hausse marginale de 939 € à 953 €. Certes, la cité béarnaise reste légèrement sous la moyenne des villes de taille équivalente (50 000 à 100 000 habitants), mais la rapidité de l’endettement interpelle.
L’opposition dénonce une gestion incohérente. Pour Jérôme Marbot, conseiller municipal d’opposition, certains projets relèvent davantage de la communication que de la nécessité :
François Bayrou dit au niveau national ce qu’il n’applique pas à Pau
accuse-t-il, prenant pour exemple la rénovation des halles « qui aurait pu coûter deux fois moins » ou encore les 40 000 € dépensés pour le bureau du maire. Cette critique met en lumière une réalité : la dynamique de la dette locale ne découle pas seulement de la conjoncture, mais aussi de choix politiques assumés.
🏗️ Investir pour attirer… ou ?
La majorité municipale, elle, défend une stratégie de relance. Pour Jean-Louis Pérès, premier adjoint au maire, les dépenses engagées – estimées à environ 10 millions d’euros sur le mandat – ne constituent pas un luxe mais une nécessité :
La ville déclinait, la population diminuait et il fallait mettre en place des équipements structurants et attractifs
rappelle-t-il. Cette approche repose sur une logique économique de long terme : renforcer l’attractivité de Pau pour capter de nouveaux habitants, stimuler l’investissement privé et élargir la base fiscale. Dans cette vision, la dette n’est pas un fardeau mais un levier d’investissement, à condition que les retombées économiques soient au rendez-vous. Mais la question demeure : l’endettement croissant est-il soutenable dans un contexte national de rigueur budgétaire, où chaque euro dépensé est scruté ?
👁️ L’œil de l’expert : la cohérence politique
L’affaire de Pau illustre une contradiction de fond entre la nécessité d’investir localement et l’impératif de discipline nationale. Si les investissements structurants peuvent dynamiser l’économie d’une ville moyenne, leur financement par l’endettement soulève la question de la soutenabilité et de la cohérence politique. Dans le cas Bayrou, ce décalage devient d’autant plus sensible qu’il occupe désormais la plus haute fonction gouvernementale. Pour les observateurs, ce dossier pourrait peser non seulement sur la crédibilité locale mais aussi sur l’image nationale d’un Premier ministre qui prône la rigueur… tout en incarnant un cas inverse à domicile.