Un avertissement anticipé aux lourdes implications économiques. C’est une douche froide pour Bercy et un signal d’alerte pour les marchés. L’agence américaine S&P Global Ratings a décidé de dégrader la note souveraine de la France à A+, soit un cran en dessous de son précédent niveau AA-, et surtout près d’un mois et demi avant la date prévue. Ce geste rare traduit une perte de confiance croissante dans la trajectoire budgétaire française, alors que la dette publique dépasse les 3 200 milliards d’euros et que le déficit reste bloqué à 5,4 % du PIB.
Au-delà du symbole, cette décision pourrait alourdir le coût de financement de la France et compliquer encore la stratégie économique du gouvernement.
🚨 Une dégradation anticipée qui secoue les marchés
Le verdict de S&P Global Ratings est tombé sans attendre : la note de la France recule à A+, un niveau qui la rapproche des économies jugées à risque modéré. Si les investisseurs s’attendaient à cette sanction, le calendrier a pris tout le monde de court. Initialement prévue pour le 28 novembre, la publication a été avancée à la mi-octobre — une décision rarissime.
Ce mouvement un mois avant la date prévue montre que la situation est jugée sérieuse. S’ils l’ont fait maintenant, c’est qu’ils estiment ne plus pouvoir attendre.
explique Alexandre Baradez, chef analyste chez IG. Dans son rapport, l’agence souligne que « l’incertitude sur les finances publiques françaises demeure élevée », en dépit du projet de budget 2026 récemment présenté. Si l’objectif d’un déficit de 5,4 % en 2025 semble atteignable, le rythme de réduction budgétaire reste trop lent selon S&P.
Autre motif d’inquiétude : l’instabilité politique. L’agence évoque « la plus grave crise institutionnelle depuis la fondation de la Ve République en 1958 », un contexte qui fragilise la capacité du pays à mener des réformes structurelles. La suspension de plusieurs mesures d’économies, censées assainir les comptes, n’a fait qu’amplifier la défiance.
📉 Des conséquences financières lourdes
Si les marchés obligataires n’ont pas immédiatement réagi — les investisseurs avaient déjà intégré cette perspective, — l’impact à moyen terme pourrait être significatif. Cette dégradation intervient alors que la dette publique française atteint 112 % du PIB et que les charges d’intérêts repartent à la hausse, au-delà de 50 milliards d’euros par an.
Pour Wilfrid Galand, directeur stratégiste chez Montpensier-Arbevel, « le calendrier de S&P est un signal fort. Ce n’est pas anodin : c’est un avertissement explicite adressé à la France ». Il rappelle que les dégradations anticipées sont extrêmement rares : depuis 2013, les agences ne peuvent déroger à leur calendrier que face à un événement exceptionnel menaçant la stabilité financière — comme la guerre en Ukraine, le Brexit ou la crise du Covid-19.
Cette nouvelle dégradation s’ajoute à celle infligée récemment par Fitch, tandis que Moody’s pourrait suivre dans les prochaines semaines. Elle alimente le spectre d’une hausse durable de la prime de risque française. Les investisseurs pourraient, à terme, exiger une rémunération plus élevée pour financer la dette tricolore — un risque majeur pour un pays dont l’endettement représente déjà plus de 3 200 milliards d’euros. Wildrid Galand insiste :
Ce n’est pas anodin ce qui vient de se passer. S&P veut signifier qu’il y a urgence à rétablir la trajectoire budgétaire, faute de quoi la note pourrait encore se détériorer.
👁️ L’œil de l’expert : la France face à son mur
L’annonce de S&P est bien plus qu’un simple ajustement technique : c’est un avertissement stratégique. Le gouvernement français doit désormais composer avec un endettement record, une croissance atone et un déficit structurel que les réformes reportées n’ont pas su endiguer.
Si cette dégradation n’a pas d’effet immédiat sur les marchés, elle affaiblit la crédibilité budgétaire de la France sur la scène européenne et internationale. La perspective d’un retour sous les 3 % de déficit avant 2030 paraît désormais compromise.
En clair : la France n’a plus le droit à l’erreur. Pour regagner la confiance des agences et des investisseurs, elle devra réformer ses dépenses structurelles, maîtriser sa trajectoire d’endettement et rétablir une stabilité politique durable. Sans cela, la facture de la dette pourrait rapidement s’alourdir, grevant la compétitivité et la croissance.