Une confiance fragile malgré un carnet de commandes mieux rempli. Le dernier baromètre de l’Association pour l’emploi des cadres (Apec), publié le 27 août, sonne l’alarme : jamais depuis 2021 les intentions de recrutement de cadres n’avaient été aussi basses. Si les entreprises affichent une confiance accrue dans leur activité — 71 % se disent optimistes, contre 61 % fin 2024 —, cette éclaircie ne se traduit pas sur le marché du travail.
Seules 8 % des sociétés interrogées déclarent envisager d’embaucher un cadre au 3ᵉ trimestre 2025, soit une baisse d’un point en un an.
Selon l’Apec, « les facteurs d’incertitude continuent de peser sur les décisions d’investissement qui s’inscrivent en retrait et influent sur la propension à recruter des cadres ». En clair, même avec un carnet de commandes mieux orienté (63 %, +4 points), les employeurs choisissent la prudence avant tout.
⚠️ Les TPE et l’industrie en première ligne
La contraction touche de plein fouet les très petites entreprises, où seulement 4 % envisagent de recruter un cadre. Mais la tendance ne s’arrête pas là : même les structures plus solides réduisent fortement la voilure. Les grandes entreprises et ETI ne sont plus que 45 % à prévoir des embauches de cadres, contre 58 % un an plus tôt (–13 points).
Secteur par secteur, l’industrie apparaît comme la grande perdante : 9 % seulement des entreprises y projettent des recrutements (–3 points en un an). Les services à forte valeur ajoutée montrent un léger sursaut (14 %, +2 points), mais restent encore loin des niveaux observés en septembre 2024 (18 %).
Cette dynamique illustre une forme d’« attentisme généralisé », avec un tissu productif qui préfère stabiliser ses charges plutôt que de miser sur de nouvelles compétences.
⚖️ Des cadres bien moins sollicités
La chute des intentions d’embauche entraîne une conséquence immédiate : la baisse des tensions sur le marché du travail des cadres. Alors que les recruteurs redoutaient encore en 2023 une pénurie de profils qualifiés, la donne change radicalement.
Désormais, seules 65 % des entreprises anticipent des difficultés à recruter un cadre au trimestre à venir, soit –17 points en un an, le niveau le plus bas depuis quatre ans.
Cette détente réduit la concurrence entre employeurs et, mécaniquement, les cabinets de recrutement sollicitent moins souvent les cadres. Comme le résume l’Apec, « progressivement, la concurrence entre recruteurs se fait moins forte et les cadres sont par ailleurs moins souvent sollicités ».
👁️ L’œil de l’expert : un signal d’alarme
Derrière ces chiffres se dessine un paradoxe inquiétant : les entreprises croient à la reprise de leur activité mais refusent d’investir dans le capital humain qui en est le moteur. En freinant les embauches de cadres, elles risquent d’affaiblir leur capacité à innover, à exporter et à s’adapter aux crises.
Si la tendance se prolonge, c’est l’ensemble du modèle de compétitivité français qui pourrait s’en trouver fragilisé. Pour les cadres en recherche de mobilité, le marché devient plus sélectif, et la négociation salariale risque de basculer en défaveur des candidats.
⚠️ La conclusion est claire : sans signaux politiques et économiques plus stables, le marché de l’emploi des cadres pourrait durablement se contracter, freinant ainsi le redémarrage attendu de l’économie française.
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