En pleine incertitude économique, les Français n’ont jamais été aussi prudents… ni aussi stratèges. Le premier semestre 2025 marque un tournant historique : 97,8 milliards d’euros ont été déposés sur des contrats d’assurance vie, selon les données publiées par France Assureurs. C’est tout simplement un record absolu, jamais atteint auparavant sur une période de six mois.
Dans le même temps, les sorties de fonds — rachats partiels ou totaux, ou versements aux bénéficiaires en cas de décès — ont reculé de 7 %, tombant à 71,2 milliards d’euros. Résultat : la collecte nette s’envole à 26,6 milliards d’euros, un niveau inédit depuis 2010. Le signal est clair : les Français plébiscitent à nouveau l’assurance vie, à la fois comme outil de sécurité patrimoniale et comme levier de rendement dans un environnement financier instable.
📊 Un socle d’épargne devenu incontournable
Derrière cette performance spectaculaire, la structure même de l’assurance vie continue de séduire tous profils d’épargnants. Comme l’indique Paul Esmein, directeur général de France Assureurs, lors d’une conférence de presse :
La dynamique de l’assurance vie est restée robuste tout au long du semestre, portée par une volonté forte des Français d’épargner dans un cadre sécurisé mais souple.
Cette tendance s’accompagne d’une répartition contrastée entre les deux types de supports disponibles :
Les unités de compte (UC), plus exposées mais potentiellement plus rémunératrices, concentrent la majorité de l’engouement, avec 23,8 milliards d’euros de collecte nette.
En parallèle, les fonds en euros, garantis en capital mais moins rentables, n’ont progressé que de 2,9 milliards d’euros.
Cette évolution reflète un changement d’attitude chez les investisseurs français, prêts à accepter davantage de risque pour optimiser leur rendement face à une inflation toujours pesante et à une rémunération de l’épargne réglementée en berne.
⚖️ Rééquilibrage du paysage de l’épargne ?
Avec 2 052 milliards d’euros d’encours à fin juin, l’assurance vie représente désormais plus d’un tiers de l’épargne financière des ménages français. Le placement écrase ses concurrents en termes de volume et de dynamique. À titre de comparaison, le Livret A n’a engrangé que 3 milliards d’euros sur la même période, soit neuf fois moins, selon la Caisse des dépôts.
Et la tendance pourrait se renforcer avec la baisse du taux du Livret A, passé de 2,4 % à 1,7 % au 1er août 2025, un niveau bien inférieur à certains rendements offerts par les unités de compte, malgré leur volatilité. Cette désaffection progressive pour l’épargne réglementée confirme que les arbitrages des ménages évoluent, favorisant des stratégies plus diversifiées et plus dynamiques.
Avec un capital moyen estimé à 100 000 € par contrat, l’assurance vie s’impose comme un pilier patrimonial autant qu’un refuge stratégique, notamment dans un contexte d’incertitude sur les marchés financiers, les régimes de retraite, ou encore la fiscalité du patrimoine.
👁 L’œil de l’expert : jusqu’à quand ?
Cette dynamique impressionnante de l’assurance vie ne doit pas masquer certaines interrogations structurelles. Le retour massif des épargnants sur les unités de compte traduit une soif de rendement, mais aussi une exposition croissante aux risques de marché. Si les taux remontaient brutalement ou si une correction boursière survenait, la confiance pourrait rapidement s’effriter.
En parallèle, la baisse de performance des fonds en euros pourrait à terme réduire l’attractivité de l’assurance vie pour les profils les plus prudents. À moyen terme, le défi pour les assureurs sera de maintenir l’équilibre entre performance, sécurité, et souplesse fiscale.