Alors que les températures estivales explosent, les piscines municipales, elles, restent désespérément closes. Le coupable ? Un déficit structurel de maîtres-nageurs, symptôme d’un modèle économique défaillant. Derrière ce manque criant se cache une réalité financière inquiétante, entre salaires gelés, désintérêt professionnel croissant et pressions budgétaires locales.
Une équation salariale intenable pour les collectivités
L’été s’installe, les piscines devraient faire le plein… sauf que nombre d’entre elles ne peuvent même pas lever le rideau. La cause ? Une pénurie de maîtres-nageurs qui vire à la crise nationale. La Fédération française des maîtres-nageurs chiffre le manque à près de 5.000 professionnels.
À Condé-en-Brie, village de l’Aisne, la mairie n’a trouvé un surveillant diplômé qu’au dernier moment. Résultat : ouverture tardive et horaires réduits. Ce cas n’est pas isolé, et la logique budgétaire des petites communes ne suit plus.
Selon les sources de RMC, le salaire moyen d’un maître-nageur tourne autour de 1.600 € nets mensuels. Une rémunération peu attractive, surtout face à la rigueur du poste : longues heures debout, amplitude horaire importante, et flexibilité imposée au gré des caprices météorologiques. Un agent confie:
Certains jours de pluie sont imposés comme repos ; à l’inverse, les canicules se transforment en marathons horaires
Agressions, usure… et désertification des vocations
La crise n’est pas que budgétaire. Elle est aussi sociale. Des agressions répétées, parfois violentes, ont lieu dans certaines piscines, poussant des établissements à fermer temporairement, comme récemment à Colmar après des menaces de mort envers le personnel.
Conséquence : le métier séduit de moins en moins. Selon les chiffres officiels, la profession vieillit. Un tiers des maîtres-nageurs ont plus de 45 ans, et 10 % dépassent même les 65 ans. Certains retraités sont rappelés en renfort l’été, un pansement sur une fracture profonde.
Les zones rurales sont les premières touchées. Les littoraux ou grandes villes continuent d’attirer les professionnels, laissant des déserts aquatiques intérieurs, où le manque de personnel entraîne la fermeture pure et simple des installations.
️ L’œil de l’expert : vers un luxe?
Ce que révèle cette crise, c’est moins une pénurie qu’un modèle économique en faillite. Les collectivités locales, souvent étranglées financièrement, ne peuvent pas offrir une grille salariale à la hauteur des exigences du métier. À l’heure où la sécurité aquatique devrait être une priorité – notamment face aux noyades estivales – la France s’enfonce dans une impasse budgétaire et sociale. Il devient urgent de repenser la valorisation du métier et son attractivité, sous peine de voir les piscines devenir un luxe réservé… aux zones riches ou balnéaires.