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Photo de télé opérateurs en activité de démarchage téléphonique
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Fin du harcèlement téléphonique : le Parlement frappe fort contre le démarchage non consenti

Une révolution silencieuse s’apprête à bouleverser le quotidien des Français : le démarchage téléphonique sans consentement est désormais illégal. Après des mois de navettes parlementaires, le Sénat a acté mercredi 21 mai l’interdiction définitive d’une pratique largement décriée : les appels commerciaux non sollicités. Un soulagement pour des millions de consommateurs harcelés quotidiennement, souvent sous couvert de prétendues « aides de l’État » ou de promesses de changement d’opérateur.

Cette décision, introduite par un amendement de la députée écologiste Delphine Batho, s’inscrit dans une vaste loi contre la fraude aux aides publiques et marque un tournant dans la lutte contre un fléau numérique devenu insupportable.

📊 Un dispositif attendu par les Français… et longtemps inefficace

Ce texte répond à une attente exprimée depuis des années par les consommateurs

se réjouit Benjamin Recher, de l’UFC-Que Choisir. Il faut dire que le constat est sans appel : selon une enquête menée par l’association en octobre 2024, 97 % des Français déclarent être excédés par les appels publicitaires non désirés. Un chiffre qui en dit long sur l’ampleur du phénomène.

Jusqu’ici, la principale réponse institutionnelle se nommait Bloctel, un registre sur lequel les particuliers pouvaient inscrire leur numéro pour limiter les démarchages. Un dispositif rapidement jugé inefficace. Témoignage à l’appui, Patrice Dejoin, 43 ans, pourtant inscrit sur la liste, explique avoir été contraint de « refuser systématiquement tous les appels provenant de numéros inconnus ». Un réflexe aujourd’hui partagé par une large partie de la population.

Les nouvelles dispositions vont beaucoup plus loin : désormais, toute entreprise devra prouver que le consommateur a donné un accord clair, libre, spécifique et révocable pour être démarché. Exit les « oui » obtenus à la volée ou les cases pré-cochées dans des formulaires en ligne. Seule exception : les appels dans le cadre d’un contrat en cours. En parallèle, le texte interdit également toute prospection commerciale électronique (SMS, email, réseaux sociaux) dans les secteurs sensibles de la rénovation énergétique et de l’adaptation du logement.

🛡️ Une avancée pour la protection des plus fragiles… mais un délai qui fait débat

Le projet de loi, porté au Sénat par Pierre-Jean Verzelen (Horizons), puis défendu à l’Assemblée par le député Thomas Cazenave (Renaissance), va au-delà du démarchage. Il introduit un véritable arsenal contre la fraude aux aides publiques, estimée à 1,6 milliard d’euros par an. Désormais, les gestionnaires des réseaux d’énergie (gaz, électricité) pourront sanctionner directement les cas de fraude avérée, notamment en cas de manipulation de compteurs. L’administration, de son côté, pourra suspendre une aide publique pendant trois mois renouvelables en cas « d’indices sérieux » de fraude.

Une mesure saluée par la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, qui a dénoncé une forme de harcèlement « vitrine de mécanismes de fraude et de vol, dont les victimes sont bien souvent les plus vulnérables et les personnes âgées ». Elle n’hésite pas à pointer les vendeurs de pompes à chaleur et de fenêtres qui exploitent sans relâche les failles de la réglementation actuelle.

Mais tout le monde ne partage pas cet enthousiasme. La France insoumise a d’ores et déjà annoncé un recours devant le Conseil constitutionnel, invoquant un « risque de dérive » lié à la remise en cause de la présomption d’innocence et de la séparation des pouvoirs.

Par ailleurs, le délai d’entrée en vigueur – août 2026 – fait grincer des dents. Beaucoup de parlementaires jugent ce report trop long, même si, comme le résume Pierre-Jean Verzelen, « un an est nécessaire pour laisser aux acteurs le temps de s’adapter ». Le compromis trouvé exclut toute exception sectorielle, y compris pour les entreprises alimentaires livrant des surgelés à domicile.

👁️ L’œil de l’expert : une avancée majeure, mais une application à surveiller

Cette réforme marque une étape décisive dans la régulation des pratiques commerciales abusives. Elle consacre un principe fondamental : le consentement préalable du citoyen comme condition sine qua non à toute sollicitation commerciale. Si la volonté politique est claire, le défi sera dans l’application : comment garantir la traçabilité du consentement ? Comment contrôler efficacement les contrevenants, souvent difficiles à identifier ?

Il faudra également veiller à ce que cette avancée ne soit pas contournée par des entreprises peu scrupuleuses ou externalisant leur démarchage à l’étranger. Mais une chose est certaine : le vent tourne en faveur des consommateurs, qui retrouvent enfin le droit à la tranquillité dans leur propre foyer.

À propos de l'auteur

Conseiller financier chez FiniDeMePriver.com depuis près de 2 ans, Enzo Poulain met son expertise au service de ses clients en leur proposant des solutions sur mesure pour optimiser leur budget et simplifier la gestion de leurs finances. Doté d’un sens aigu du détail et d’un réel engagement pour le travail bien fait, Enzo partage également des astuces pratiques pour aider chacun à maintenir un budget équilibré et adapté à ses besoins.