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Photo du Capitole, siège du Congrès américain. Il est situé dans la capitale Washington.
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Washington retourne sa veste : vers la fin de la guerre tarifaire avec l’Europe ?

Passé presqu'inaperçu du fait d'une actualité riche en fin de semaine dernière, c’est pourtant un virage aussi inattendu que stratégique qui s'est déroulé sous nos yeux il y a quelques jours : les États-Unis, longtemps arc-boutés sur une politique protectionniste vis-à-vis de l’Union européenne, revoient brutalement leur position sur les droits de douane. Désormais, le seuil de 10 % n’est plus envisagé comme un minimum, mais comme un plafond — une évolution de doctrine qui marque un recul net par rapport aux tensions commerciales de l’ère Trump. Reste à savoir si cette inflexion est le prélude d’un nouvel ordre économique transatlantique ou une simple réaction tactique à des pressions internes et financières.

🤜 De l’affrontement commercial à une rhétorique d’alliés

Il y a encore peu, les relations économiques entre Washington et Bruxelles se résumaient à un bras de fer autour des taxes, des barrières douanières et des désaccords fiscaux. Pourtant, lors des récentes réunions du printemps du FMI et de la Banque mondiale à Washington, le discours a radicalement changé. Les responsables américains, au ton soudain apaisé, ont décrit leurs homologues européens comme « best friends and allies », selon une formule relevée par plusieurs participants et qui, comme le souligne Howard Lutnik, « n’avait pas été entendue depuis des années ».

Cette nouvelle posture s’est également manifestée lors du G7 Finances, où les Européens ont été pris de court par cette volte-face, tant elle tranche avec la fermeté qui dominait jusqu’alors les discussions bilatérales. Le taux de 10 % de droits de douane, jusqu’ici considéré comme un seuil minimal, est désormais présenté comme un plafond — voire comme un objectif à abaisser. Cette ouverture, quoique informelle, remet en question l’ensemble de l’approche tarifaire américaine post-2017.

🛞 Un changement sans cap défini

Malgré cette détente verbale, aucun mandat officiel n’a encore été accordé aux représentants américains pour entamer des négociations concrètes. Ni le secrétaire au Trésor Scott Bessent, ni le secrétaire au Commerce Howard Lutnik n’ont reçu d’instruction claire de la Maison-Blanche. Ils se contentent, pour l’heure, d’afficher leur volonté de « rester ouverts à la discussion », notamment autour de convergences réglementaires ou d’accords sectoriels.

Mais ce changement de ton s’inscrit dans un contexte économique tendu. Les États-Unis poursuivent en parallèle une ambitieuse réforme fiscale, visant à réduire massivement les impôts d’ici le 4 juillet. La disparition des recettes issues des droits de douane complique cependant cette équation budgétaire. Plus encore, les tensions observées sur les marchés obligataires semblent avoir poussé l’exécutif américain à adopter une attitude plus conciliante, face à un environnement financier instable.

Dès lors, une interrogation demeure, posée par de nombreux observateurs : ce revirement marque-t-il une inflexion durable de la politique économique américaine, ou s’agit-il d’une tactique conjoncturelle visant à rassurer les marchés et les partenaires, sans réelle volonté de réforme structurelle ?

👁 L'œil de l'expert : réalignement stratégique ou simple pause diplomatique ?

L’ouverture tarifaire annoncée par Washington pourrait marquer un tournant dans les relations commerciales transatlantiques. Toutefois, l’absence de mandat formel et les contradictions internes de la politique économique américaine laissent planer un doute. Si cette détente reflète bien un changement de cap stratégique, elle pourrait ouvrir la voie à une nouvelle architecture des échanges mondiaux. Dans le cas contraire, elle ne serait qu’un artifice conjoncturel, destiné à temporiser une situation économique sous tension. Une certitude néanmoins : l’Europe doit se préparer à toutes les options, entre coopération et retour des frictions.

À propos de l'auteur

Des années d’expérience et d’expertises financières, Fabien MONVOISIN est PDG du Groupe Win’Up composé de 4 enseignes spécialisées dans le regroupement de crédits, son ambition aujourd’hui est de décrypter l’actualité économique et financière dans l’objectif d’éclairer tous les Français