Crédits verts : croissance spectaculaire... mais encore marginale face aux enjeux climatiques
Le verdissement de la finance prend de l’ampleur en France. En 2024, les banques de l'Hexagone ont injecté 471 milliards d’euros dans des projets liés à la transition énergétique, soit une hausse spectaculaire de 27 % en un an, selon les derniers chiffres de la Fédération bancaire française (FBF). Un chiffre qui impressionne, mais qui cache une réalité plus nuancée : comparé au poids colossal du système bancaire, ces engagements restent encore marginaux.
Derrière les courbes en hausse, se pose une question fondamentale : la finance française est-elle véritablement en train de changer de cap ou ne s'agit-il que d'une cosmétique verte ?
🌬️ Des engagements climatiques qui progressent à grande vitesse
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : entre 2023 et 2024, les prêts destinés aux énergies renouvelables ont bondi de 28 %, atteignant 96 milliards d’euros, tandis que les financements aux énergies fossiles ont reculé de 15 %, pour tomber à 37 milliards d’euros. Cette dynamique traduit une volonté affirmée des banques de réorienter leurs portefeuilles vers des actifs plus durables.
Parmi les grands noms de la finance française, Natixis, Crédit Agricole, Société Générale et BNP Paribas se distinguent. Elles se hissent toutes dans le top 10 mondial des financeurs de projets d’énergies renouvelables, selon la FBF. Une performance que Nicolas Namias, président du directoire de BPCE et président de la commission climat et biodiversité de la FBF, commente ainsi :
À l’échelle mondiale, les banques françaises sont parmi les plus mobilisées pour soutenir la transition environnementale.
Autre signe encourageant : aucun établissement français ne figure désormais parmi les dix plus grands bailleurs de fonds du secteur des hydrocarbures à l’échelle mondiale. Cela marque une rupture nette avec le passé, où certaines de ces banques figuraient encore sur ces listes controversées.
💼 Un verdissement réel mais dérisoire à l’échelle du système bancaire
Malgré ces signaux positifs, le contraste avec la masse totale des activités bancaires est saisissant. Les crédits verts et durables représentent à peine 5 % des 9 289 milliards d’euros que pèse le secteur bancaire français en 2023, selon l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Une proportion qui relativise fortement l’enthousiasme affiché par certains acteurs.
À y regarder de plus près, la croissance des crédits verts s’inscrit encore dans une logique de communication et de positionnement stratégique face à une pression sociétale croissante, plus que dans un bouleversement structurel des politiques de financement. Les critiques pointent une transition bancaire trop lente et insuffisamment radicale, alors que les rapports climatiques se multiplient pour alerter sur l’urgence d’agir.
En parallèle, le désengagement progressif des secteurs fossiles reste très partiel : malgré la baisse, 37 milliards d’euros continuent d’y être injectés en 2024. De quoi alimenter le débat sur la sincérité des engagements pris et sur la définition même d’une "banque durable".
👁 L’œil de l’expert : un virage amorcé, mais encore bien timide
👉 Si la hausse des crédits verts est indéniablement une bonne nouvelle, elle ne saurait masquer l’ampleur de la tâche qui reste à accomplir. Le système bancaire français semble avoir pris la mesure de son rôle dans la lutte contre le changement climatique, mais le chemin à parcourir est encore long pour transformer l’intention en transformation systémique.
À ce rythme, la transition écologique pourrait ne jamais rattraper l’accélération de la crise climatique. La finance verte doit cesser d’être un compartiment à part : elle doit irriguer l’ensemble de l’activité bancaire, en devenant la norme, non l’exception.
À propos de l'auteur
Conseiller financier chez FiniDeMePriver.com depuis près de 2 ans, Enzo Poulain met son expertise au service de ses clients en leur proposant des solutions sur mesure pour optimiser leur budget et simplifier la gestion de leurs finances. Doté d’un sens aigu du détail et d’un réel engagement pour le travail bien fait, Enzo partage également des astuces pratiques pour aider chacun à maintenir un budget équilibré et adapté à ses besoins.