Le signal d’alerte d’un secteur sous pression financière. Symbole d’une mode française dynamique et accessible, JOTT (Just Over The Top) rejoint à son tour la liste grandissante des marques fragilisées par la crise du prêt-à-porter. La société marseillaise, connue pour ses doudounes légères et colorées, a été placée en redressement judiciaire par le tribunal des activités économiques de Marseille, ouvrant une période d’observation de six mois.
Au-delà du cas JOTT, cette décision judiciaire met en lumière les déséquilibres économiques profonds qui traversent aujourd’hui l’industrie de la mode en France, entre pression sur les marges, concurrence internationale exacerbée et mutation accélérée des comportements de consommation.
⚖️ Redressement judiciaire : que s’est-il passé ?
Le jugement rendu par le tribunal marseillais acte l’état de cessation de paiements de la société SAS JOTT, tout en laissant une chance à l’entreprise de se restructurer. Une période d’observation provisoire de six mois a été accordée, avec une audience clé programmée le 5 février, destinée à évaluer la capacité réelle de financement de l’activité et la viabilité économique du modèle.
Sur le plan financier, les chiffres donnent une lecture contrastée. JOTT affiche un chiffre d’affaires annuel de 24 millions d’euros et emploie 183 salariés, avec des salaires encore réglés à fin novembre. Des indicateurs qui témoignent d’une entreprise toujours opérationnelle, mais manifestement fragilisée par des tensions de trésorerie, dans un contexte où les coûts logistiques, énergétiques et commerciaux ont fortement progressé.
Comme le souligne Jocelyn Meire, président du syndicat Mode in Sud, à La Provence, « JOTT n’est pas seulement une entreprise locale, mais une success-story marseillaise ». Son placement sous protection judiciaire est donc perçu comme un signal macro-sectoriel, révélateur d’un modèle économique devenu plus difficile à soutenir sans ajustements profonds.
La marque évolue dans un environnement particulièrement hostile : montée en puissance de la mode ultra-éphémère asiatique, domination des plateformes d’e-commerce à bas coûts, et essor de la seconde main, qui capte une part croissante de la demande tout en comprimant les prix. À cela s’ajoutent des enjeux réglementaires et concurrentiels, notamment face à des géants globaux comme Shein, qui bouleversent les équilibres traditionnels du marché.
Le cas JOTT fait écho à d’autres restructurations récentes, comme celle du groupe IKKS, sauvé in extremis au prix d’une réduction massive des effectifs. Autant d’exemples qui illustrent une recomposition brutale du paysage du prêt-à-porter français, où seules les marques capables d’adapter rapidement leur chaîne de valeur et leur positionnement prix semblent en mesure de résister.
👁️ L’œil de l’expert : pas un accident isolé
Le redressement judiciaire de JOTT ne doit pas être lu comme un simple échec, mais comme le révélateur d’un changement de cycle économique pour la mode française. Les marques intermédiaires, ni luxe ni low-cost, sont aujourd’hui prises en étau.
La période d’observation sera décisive : restructuration financière, ajustement des coûts, refonte de la distribution ou repositionnement stratégique seront indispensables pour éviter la liquidation. Plus largement, le dossier JOTT rappelle que la compétitivité ne se joue plus seulement sur le produit, mais sur la solidité financière, la maîtrise des flux et l’agilité face à un marché mondialisé.

