Une embellie trompeuse sur fond de faiblesse structurelle. Le marché automobile français a connu en août 2025 un léger rebond, mais la tendance reste préoccupante. Selon les données de AAA Data, 87 850 voitures particulières ont été immatriculées, soit une hausse de 2,19 % sur un an. En y ajoutant les utilitaires légers, le marché global progresse de 1,21 %. Corrigée du nombre de jours ouvrés (un de moins qu’en 2024), la hausse atteint même 7,29 %.
Derrière ces chiffres encourageants, le bilan reste fragile : depuis janvier, les immatriculations reculent encore de 7,14 % et demeurent loin des niveaux historiques (105 000 immatriculations en moyenne sur dix ans pour un mois d’août). La dynamique commerciale confirme cette fragilité : après une embellie printanière, les commandes se sont effondrées en juillet (–18 %), creusant un retard de près de 100 000 véhicules.
🔋 Une électrification pleine de promesses
Le véritable moteur du marché réside aujourd’hui dans l’électrification, mais son développement reste semé d’embûches. Les modèles électrifiés (BEV, HEV, MHEV, PHEV, EREV) représentent 71 % des ventes d’août, confirmant une transformation structurelle du parc. Les véhicules 100 % électriques progressent de 28 % en un an, portés par les achats de flottes, et atteignent désormais près de 20 % du marché.
Pour autant, la transition demeure confuse. « En un an rien n’a changé », observe Julien Billon, directeur général de AAA Data. Selon lui, les freins restent nombreux : prix élevés, incertitudes réglementaires, désinformation sur l’électrique, complexité technologique pour le consommateur. Les dispositifs publics, comme le leasing social ou les financements adossés aux certificats d’économie d’énergie, pourraient redonner un souffle au marché au dernier trimestre, mais leur efficacité reste incertaine.
Fait notable, les BEV affichent une résilience impressionnante : avec seulement 2 % de recul, leur part de marché s’établit à 18 %, soit un point de plus qu’en août 2024.
🏎️ Marques en pole position
Côté constructeurs, Renault domine toujours le marché global avec 14,92 % de parts, devant Peugeot (13,37 %) et Dacia (9,40 %). Sur le segment électrique, les grands gagnants du mois sont Renault (R5), Tesla (Model Y), BMW (iX1) et Dacia (Spring). À l’inverse, des marques comme Mercedes et DS demeurent trop dépendantes du diesel, qui représente encore 34 % et 25 % de leurs ventes respectives, contre seulement 5 % pour l’ensemble du marché.
Si le marché reste globalement en berne, certains constructeurs tirent leur épingle du jeu en 2025 : BMW, Renault, MG, Honda, BYD, Leapmotor et Xpeng affichent une croissance solide, témoignant d’une stratégie bien adaptée au virage électrique.
👁️ L’œil de l’expert : ça coince encore
Le sursaut d’août donne l’illusion d’une reprise, mais il masque une fragilité de fond. La demande intérieure reste freinée par la chute des commandes, la pression sur les prix et l’incertitude réglementaire. L’électrification, bien qu’en marche, souffre d’un manque de lisibilité stratégique et de dispositifs publics encore trop instables. Pour que la transition se transforme en moteur durable de croissance, il faudra une clarification du cadre fiscal et réglementaire, une politique d’incitation plus lisible et un effort massif d’industrialisation. Sans cela, le marché automobile français risque de rester coincé dans une zone de stagnation, où les volumes se maintiennent artificiellement sans réelle dynamique structurelle.