Le spectre d’une crise économique transatlantique. Alors que l’administration Trump envisage sérieusement une hausse drastique des droits de douane — jusqu’à 50 % — sur certains produits européens, la France se retrouve en première ligne des potentielles victimes économiques. Selon une analyse approfondie du cabinet Asterès, datée du 22 juin, cette offensive tarifaire pourrait faire vaciller jusqu’à 45 000 emplois dans l’Hexagone, frappant au cœur des secteurs les plus exportateurs comme le vin, la maroquinerie ou les cosmétiques. Un choc asymétrique aux lourdes retombées pour les filières à forte valeur ajoutée, mais dont les répercussions pourraient aussi se retourner contre les consommateurs américains eux-mêmes.
Le luxe, le vin et les cosmétiques en zone rouge
Trois piliers de l’excédent commercial français sont directement dans la ligne de mire des nouvelles taxes douanières : les vins et spiritueux (8 % des exportations vers les États-Unis), les produits de beauté (6 %) et la maroquinerie de luxe (6 %). Ces secteurs représentent ensemble près de 8,4 milliards d’euros d’excédent vis-à-vis des États-Unis. Ils concentreraient aussi à eux seuls 14 000 suppressions d’emploi potentielles, dont 3 600 seraient des postes directs, en cas d’application du scénario le plus sévère, précise Asterès.
Deux cas de figure sont évoqués :
- 20 % de droits de douane : pertes estimées à 1 milliard d’euros, impactant 17 000 emplois.
- 50 % de droits de douane : pertes chiffrées à 2,5 milliards d’euros, avec 45 000 emplois menacés.
L’étude insiste sur le fait que « ces trois secteurs sont particulièrement visés puisqu’ils forment le trio des secteurs français ayant le plus fort excédent commercial vis-à-vis des États-Unis », explique le cabinet Asterès. En effet, les exportations françaises de vin affichent un excédent de 3,8 milliards d’euros, les cosmétiques 2,4 milliards et le cuir 2,2 milliards. Des filières de prestige, mais aussi des piliers de l’économie réelle.
Un pari économique risqué pour les États-Unis
Mais cette stratégie tarifaire pourrait bien se retourner contre l’économie américaine elle-même. Le cabinet Asterès rappelle une étude de Bruegel, think tank européen, selon laquelle les effets économiques d’une guerre commerciale seraient deux fois plus sévères pour les États-Unis que pour l’Union européenne. En clair, les ménages américains paieraient le prix fort de cette confrontation.
Les estimations sont claires : 51 milliards de dollars de pertes pour les États-Unis, soit 2,7 % de leur PIB. Le renchérissement des produits importés viendrait alourdir l’inflation et peser directement sur le pouvoir d’achat des Américains. En ciblant les produits européens les plus qualitatifs et prisés, Washington risque de se priver d’un approvisionnement essentiel sans alternative équivalente sur son marché intérieur.
Par ailleurs, les négociations sont dans l’impasse. La date limite du 9 juillet approche, laissant peu de marge pour un compromis diplomatique. Aucun signe tangible d’avancée n’a été observé, et l’escalade commerciale semble imminente.
️ L’œil de l’expert : un bras de fer perdant-perdant
Cette montée des tensions tarifaires révèle une mécanique à double tranchant. D’un côté, la France risque de voir ses fleurons sectoriels fragilisés, avec un impact direct sur l’emploi. De l’autre, les États-Unis courent le risque de s’autopénaliser, en réduisant leur accès à des produits européens stratégiques tout en nourrissant une inflation intérieure. En ciblant les secteurs les plus performants de l’économie française, Donald Trump joue une carte politique à haut risque économique. Un terrain miné où l’absence de dialogue pourrait coûter cher… des deux côtés de l’Atlantique.