Le groupe Brandt, figure historique de l’électroménager en France, se trouve à un moment décisif de son histoire. Placé en redressement judiciaire et confronté à une activité quasiment paralysée, le fabricant centenaire entre dans une phase de négociation urgente où chaque jour compte. Selon Le Parisien, l’État se dit prêt à mobiliser une enveloppe de 5 millions d’euros pour soutenir un projet de reprise sous forme de Scop, une solution qui pourrait maintenir une partie des emplois et offrir une issue industrielle à une entreprise menacée d’effondrement. Dans un secteur fragilisé par la crise immobilière et la baisse de la consommation, l’avenir de Brandt soulève des enjeux économiques majeurs.
🏭 Une reprise en Scop ?
Un projet de sauvetage centré sur l’emploi – Alors que Brandt compte près de 750 salariés en France, seulement 300 postes pourraient être préservés dans la configuration proposée. Le ministre délégué à l’Industrie, Sébastien Martin, explique que le plan exige un repositionnement stratégique : « Soit on pense qu’on va pouvoir garder tout le monde, mais il n’y a pas d’avenir ; soit on accepte un recentrage ».
L’initiative, portée par les salariés sous statut Scop et soutenue par Revive, propriétaire notamment d’HappyVore, apparaît comme la seule option capable de maintenir les deux usines du groupe – situées près d’Orléans et à Vendôme. Aucun autre projet soumis au tribunal ne prévoit de conserver ces sites industriels clés.
Une situation financière critique – D’après Cyril Aubert, secrétaire CFTC du CSE central, Brandt doit sécuriser très rapidement des financements pour ne pas sombrer; rappelant qu’il faudrait 20 millions d’euros pour relancer l’activité.
L’entreprise, propriété du groupe algérien Cevital depuis 2014, génère pourtant encore 260 millions d’euros de chiffre d’affaires. Mais la trésorerie est exsangue : les salaires ne pourront plus être versés au-delà du 15 décembre, selon les représentants syndicaux. Pour espérer convaincre les investisseurs privés, les équipes doivent désormais démontrer que la Scop peut devenir un projet industriel viable à long terme.
Un secteur sous pression économique – Le marché du gros électroménager traverse l’une de ses périodes les plus difficiles depuis une décennie. Selon les données du Gifam, le secteur a encore reculé en 2024, affichant une baisse de -3,9 %, après un premier repli enregistré en 2023. Ce ralentissement s’explique largement par la contraction du marché immobilier, la chute des transactions dans l’ancien, la diminution des achats liés aux déménagements et aux rénovations, et surtout une consommation globalement atone dans le contexte inflationniste.
Pour Brandt, la conjoncture ajoute une pression supplémentaire : une entreprise déjà fragilisée par une organisation industrielle coûteuse demande des volumes de ventes élevés pour rester rentable. Or, la demande ne suit plus.
👁 L’œil de l’expert : les faiblesses industrielles françaises
La situation de Brandt montre une réalité fréquente dans l’industrie française : des groupes historiques fragilisés par la concurrence internationale, des coûts de production élevés et une dépendance forte à la conjoncture intérieure. Le soutien public proposé par l’État — 5 M€ — est davantage un levier de confiance qu’un financement décisif, car la relance nécessitera des capitaux bien plus importants.
Si la Scop est validée, Brandt pourrait devenir un symbole de résilience industrielle et de gouvernance participative. Mais si les investisseurs privés ne suivent pas, l’entreprise risque une liquidation qui laisserait un vide majeur dans la filière électroménager.
En 2025, l’enjeu dépasse Brandt : c’est toute la chaîne industrielle française qui cherche un modèle durable pour résister aux crises successives.





