Alors que les locataires subissent déjà une flambée des loyers et une raréfaction dramatique de l’offre locative, un nouveau coup dur se profile : les honoraires d’agence à leur charge vont officiellement augmenter à compter du 1er janvier 2026. Un arrêté du ministère du Logement daté du 17 juillet 2025 met fin à plus d’une décennie de gel des plafonds en vigueur. L’annonce, bien accueillie par les professionnels du secteur, pourrait peser lourd sur les finances des ménages déjà fragilisés.
📈 Une hausse encadrée mais inédite depuis 2014
Le changement est historique. Depuis 11 ans, les frais d’agence immobilière à la charge des locataires étaient plafonnés selon un barème figé en 2014 :
12 €/m² en zone très tendue,
10 €/m² en zone tendue,
8 €/m² ailleurs,
auxquels s’ajoutaient 3 €/m² pour l’état des lieux, soit des plafonds globaux respectifs de 15 €, 13 € et 11 € par m².
L’arrêté du 17 juillet prévoit un réajustement de ces plafonds à partir de l’évolution de l’indice de référence des loyers (IRL) entre le troisième trimestre 2024 et celui de 2025. Cet indice, aligné sur l’évolution annuelle des prix à la consommation, était de +1,04 % au deuxième trimestre 2025, ce qui laisse présager une augmentation autour de 1 %.
Concrètement, cela se traduira par une hausse relativement modérée :
+8,40 € pour un logement de 40 m² à Paris (soit un total de 608,40 € au lieu de 600 €),
+14 € pour un 90 m² à Valence (passant de 990 à 1004 €),
selon les estimations de L’Internaute.
Mais l’enjeu dépasse ces quelques euros : c’est le principe même de la revalorisation, et potentiellement sa pérennisation, qui marque un tournant.
🔁 Vers une indexation annuelle automatique ?
Si cette revalorisation est pour l’heure ponctuelle, certains acteurs du secteur plaident déjà pour une adaptation régulière, automatique et légale des plafonds. Interrogée par Capital, Danielle Dubrac, présidente de l’UNIS (Union des Syndicats de l’Immobilier), est claire :
« Il faut aller plus loin, en faisant évoluer la loi pour rendre automatique la révision annuelle des plafonds d’honoraires. »
L’idée serait de calquer ce mécanisme sur l’IRL, comme pour les loyers, permettant aux agences immobilières de répercuter chaque année une part de l’inflation. Une revendication de longue date des administrateurs de biens, dans un contexte où les marges des professionnels sont sous pression, notamment en raison des nouvelles exigences réglementaires (diagnostics, encadrement, transparence…).
Cependant, cette évolution tombe à un moment particulièrement délicat pour les locataires. Le marché est frappé par un déséquilibre structurel de l’offre, les loyers explosent dans les grandes agglomérations, et la pression financière sur les ménages modestes atteint un sommet. Dans ce contexte, même une hausse modeste des frais d’entrée dans un logement peut aggraver la fracture locative.
👁️ L’œil de l’expert : une potentielle dérive
Sous un angle économique, cette mesure marque un retour à une logique d’ajustement monétaire dans l’immobilier, jusque-là gelée pour des raisons sociales. Si elle peut se justifier par la nécessité d’assurer la viabilité des agences, elle risque d’introduire une inflation insidieuse des coûts d’accès au logement. En effet, toute indexation automatique basée sur l’IRL pourrait, à terme, créer un effet cumulatif, d’autant plus préoccupant que les aides à la location (APL, garanties, plafonds de ressources) ne suivent pas le même rythme.
Il serait donc pertinent que les pouvoirs publics accompagnent cette décision d’une réflexion globale sur le financement du parcours locatif, notamment pour les jeunes et les travailleurs précaires. Car répercuter l’inflation sur les frais d’entrée, sans revaloriser les dispositifs de soutien, ne fera que creuser les inégalités d’accès au logement.