Alors que la filière textile traverse une tempête économique sans précédent, la société Le Relais annonce ce 22 juillet 2025 la reprise de ses collectes dès jeudi. Une décision pragmatique, soutenue par une enveloppe gouvernementale jugée encore « insuffisante » pour sauver durablement le secteur. Analyse d’un équilibre financier instable, entre aides publiques et dérive du modèle économique.
🚨 Une reprise sous pression économique
Après une semaine d’arrêt brutal, Le Relais, acteur historique du tri et du recyclage textile en France, reprend ses opérations de collecte à partir du 24 juillet. Cette décision fait suite au versement d’une enveloppe exceptionnelle de 15 millions d’euros, annoncée par la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, le 18 juillet dernier. Cette aide porte à 49 millions d’euros le soutien public prévu pour la filière sur l’année 2025.
Si l’entreprise reconnaît dans son communiqué une « belle avancée », elle reste lucide : cette enveloppe permet surtout d’éviter l’effondrement immédiat.
Pour que la filière soit repensée dans son ensemble, encore faut-il que les acteurs soient en activité au moment des discussions
insiste Le Relais, soulignant que cette reprise vise à maintenir un dialogue essentiel avec les pouvoirs publics.
La société précise par ailleurs que le premier versement de cette aide est prévu dès le mois d’août. Une bouffée d’oxygène, certes, mais insuffisante à ses yeux : la rémunération par tonne de textiles triés passera de 156 € à 223 € dès août, mais Le Relais réclame 304 € par tonne pour garantir un modèle économiquement viable.
🏭 Une filière textile en péril financier
Derrière cette reprise temporaire, le malaise structurel persiste. En cause, selon Le Relais : une rétribution chroniquement sous-évaluée par l’éco-organisme Refashion, organisme mandaté par l’État pour gérer la fin de vie des produits textiles. Actuellement, l’éco-participation moyenne payée par les marques ne dépasse pas trois centimes d’euros par article, tandis que Refashion reverse seulement 0,8 centime aux structures de tri comme Le Relais.
Cette équation financière menace toute la chaîne de valorisation textile. Face à la montée en puissance de la fast fashion et ultra fast fashion, le volume de textiles à traiter explose… mais sans financement suffisant pour compenser les coûts logistiques et humains du tri. Résultat : une filière en crise, dont les acteurs historiques réclament une refonte profonde du modèle de rémunération.
Pour Le Relais, la dérive actuelle est claire : « Nous assurons le recyclage d’une industrie qui se finance à perte », résume un porte-parole de l’entreprise. Et même si la rémunération doit atteindre 228 € par tonne en 2026, l’écart avec les 304 € demandés reste conséquent. Dans ce contexte, chaque tonne triée représente aujourd’hui un déficit structurel.
👁 L’œil de l’expert : un modèle à réinventer
La situation du Relais illustre les limites d’un modèle économique dépendant des aides publiques pour survivre. Si l’intervention gouvernementale permet d’éviter un blocage prolongé des collectes, elle ne règle en rien le problème fondamental : la dissymétrie entre le coût réel du tri textile et la contribution versée par les marques du secteur.
Dans un marché dominé par la production de masse à bas prix, l’éco-participation n’est plus un levier suffisant pour financer une fin de vie responsable des produits. Comme le souligne Agnès Pannier-Runacher, une réforme globale est inévitable :
La filière textile doit s’adapter aux enjeux environnementaux et revoir ses mécanismes de financement, sous peine d’asphyxie.
Pour les analystes du secteur, la solution passe par une augmentation substantielle des éco-contributions payées par les industriels, couplée à une valorisation accrue des métiers du tri et du recyclage, afin de garantir une véritable économie circulaire.
En somme, nous assistons à une reprise des collectes sans garantie de pérennité. Le secteur attend désormais un signal politique fort pour assurer sa survie économique.