Productivité, compétitivité et rétention des talents au cœur d’un basculement du modèle du travail. La semaine de travail de quatre jours n’est plus un simple sujet de débat académique ou syndical. Elle s’impose désormais comme un enjeu économique central, porté par une génération qui redéfinit le rapport au travail et par des entreprises en quête de performance durable. Un récent sondage mené aux États-Unis et relayé par Newsweek révèle un soutien massif des Millennials, au moment même où plusieurs organisations expérimentent déjà ce modèle avec des résultats tangibles. Au-delà de la dimension sociale, cette évolution interroge directement la productivité, la rentabilité du capital humain et la compétitivité des entreprises dans une économie de plus en plus fondée sur la connaissance et les technologies numériques.
📈 Productivité, coûts cachés et nouvelle équation
Selon une enquête conduite par Redfield & Wilton Strategies pour Newsweek auprès de 4 000 Américains, 63 % des répondants se déclarent favorables à l’instauration d’une semaine de travail de quatre jours. Plus révélateur encore sur le plan économique : 46 % estiment que ce modèle pourrait accroître la productivité, remettant en cause l’équation historique « plus d’heures = plus de valeur ».
Les Millennials apparaissent comme le moteur de cette transformation. 74 % d’entre eux souhaitent une réduction du temps de travail, et 44 % se disent “fortement favorables” à une semaine plus courte. À titre de comparaison, 50 % des personnes nées en 1964 ou avant y sont également favorables, signe que le sujet dépasse désormais les clivages générationnels.
Ce basculement intervient dans un contexte où les États-Unis figurent parmi les pays développés où le temps de travail est le plus élevé, sans pour autant afficher les meilleurs indicateurs de bien-être ou de productivité marginale. Le sénateur Bernie Sanders a ainsi rappelé devant une commission du Sénat en mars 2024 que « les Américains travaillent plus d’heures que les citoyens d’autres nations tout aussi riches » (Newsweek).
Du côté des entreprises, les retours d’expérience commencent à peser lourd dans le débat. Lisa Countryman-Quiroz, PDG de la Jewish Vocational Service (JVS), considère que le modèle traditionnel est devenu obsolète :
La semaine de cinq jours et quarante heures a été conçue pour un monde qui n’existe plus
explique-t-elle dans Newsweek, soulignant que les nouvelles technologies ont profondément transformé les modes de production. Depuis l’adoption d’une semaine de quatre jours, JVS observe des résultats qu’elle qualifie d’« impressionnants » :
Nos employés sont plus productifs, l’équilibre vie professionnelle-vie privée s’est amélioré, les situations de burn-out ont reculé et notre taux de turnover a presque été divisé par deux
détaille-t-elle.
D’un point de vue strictement financier, ces indicateurs sont loin d’être anecdotiques. Moins de turnover, c’est moins de coûts de recrutement, de formation et de désorganisation interne. Moins de burn-out, c’est aussi une réduction de l’absentéisme et des dépenses indirectes liées à la santé au travail.
👁️ L’œil de l’expert : un levier de performance
Derrière la revendication sociale se dessine une opportunité économique majeure. La semaine de quatre jours ne constitue pas une baisse du temps de travail au sens classique, mais une optimisation du facteur travail. Pour les entreprises, l’enjeu n’est plus le nombre d’heures facturées, mais la valeur créée par heure travaillée.
Dans un marché du travail sous tension, marqué par la guerre des talents et la quête de sens, ce modèle pourrait devenir un avantage compétitif décisif, notamment pour attirer et fidéliser les profils qualifiés. À condition toutefois d’une mise en œuvre rigoureuse, fondée sur des objectifs clairs, des indicateurs de performance précis et une réorganisation intelligente des processus.
À moyen terme, la semaine de quatre jours pourrait ainsi s’imposer non comme un coût, mais comme un investissement stratégique dans la productivité et la soutenabilité du capital humain.

