À l’heure où le cacao devient une denrée presque aussi précieuse que l’or, les chocolatiers doivent composer avec une flambée inédite des coûts de production. En cette saison de Pâques 2025, le traditionnel achat de lapins et poules en chocolat est frappé de plein fouet par un contexte économique tendu. Malgré l’attachement des Français à ce rituel festif, les hausses de prix atteignent des sommets, et les consommateurs, eux, réduisent la voilure. Un phénomène conjoncturel qui soulève des questions plus profondes sur la durabilité du modèle de production et la résilience de la filière cacao.
Augmentation du prix du chocolat : tension sur le marché du cacao en 2025
Le point de bascule s’est opéré début 2023. Jusque-là relativement stables, les cours du cacao se sont envolés sous l’effet de conditions climatiques extrêmes, touchant lourdement l’Afrique de l’Ouest – région qui fournit environ 70 % de la production mondiale de fèves. Pluies torrentielles et sécheresse alternées ont favorisé l’apparition de maladies des cacaoyers, notamment en Côte d’Ivoire et au Ghana, déstabilisant durablement les récoltes.
Résultat : le prix de la tonne de cacao sur le marché londonien est passé de 1.900 livres en janvier 2023 à un pic historique de plus de 9.000 livres fin 2024, soit une multiplication par 4,5 en à peine deux ans. Même si les cours ont reflué début 2025 (autour de 6.200 livres fin mars), les stocks achetés par les industriels pour Pâques ont été contractés au plus haut, rendant l’impact sur les produits inévitable.
Selon une étude de l’UFC-Que Choisir, relayée le 31 mars, les prix des chocolats de Pâques ont augmenté de 14 % en moyenne, et même de 23 % pour les marques distributeurs, bien qu’elles demeurent moins onéreuses que les marques nationales. Une augmentation exceptionnelle, surtout dans un contexte où l’inflation alimentaire globale est retombée sous les 0,5 % en 2024.
Inflation sur le chocolat : Des consommateurs sous pression pour fêter Pâques
Le réflexe est clair : les clients achètent, mais en plus petite quantité. Comme le note Jacques, un consommateur parisien interrogé par l’AFP, il privilégie désormais des formats plus modestes, constatant une hausse d’environ 15 % par rapport à 2024. Mais pas question de renoncer : « C’est un achat plaisir« , explique-t-il. Cet attachement culturel au chocolat, très fort à Pâques et à Noël, demeure un atout pour la filière, comme le rappelle Gilles Rouvière, secrétaire général du Syndicat du Chocolat.
Cependant, la conjoncture ne laisse pas indemne. Olivier Dauvers, expert en consommation, anticipe « un mauvais millésime » pour les ventes de Pâques 2025. « Même si l’inflation est justifiée« , dit-il, « une part des clients ne peuvent pas suivre, tout simplement ». Les enseignes cherchent à limiter la casse, à l’image des Mousquetaires (Intermarché, Netto), qui affirment ne pas avoir réduit la teneur en cacao de leurs produits, tout en proposant des alternatives plus économiques comme des œufs garnis de crème au lait.
Pour autant, le pic d’achat se concentrant dans la semaine précédant Pâques, il reste difficile de tirer des conclusions définitives. Mais l’équation est complexe : maintenir la qualité, contenir les prix, et fidéliser une clientèle de plus en plus attentive à son pouvoir d’achat.
L’œil de l’expert : repenser la filière pour garantir la durabilité
Face à une volatilité persistante des marchés agricoles, la filière chocolat doit entamer une transition stratégique. Cela passe par la sécurisation des chaînes d’approvisionnement, le soutien aux petits producteurs, et la diversification des formats et des ingrédients pour conserver l’accessibilité des produits. À plus long terme, la transparence sur les hausses de prix et les marges deviendra un levier clé de confiance entre marques et consommateurs.
